Il n'y a pas que le géant américain du commerce en ligne Amazon qui ambitionne de livrer des colis en utilisant des drones. Depuis quelques mois, des individus sans scrupule utilisent ces petits engins volants qui peuvent être pilotés à distance dans l'espoir de faire entrer de la marchandise illégale dans certains pénitenciers fédéraux, a appris La Presse.

À l'établissement Drummond, prison à sécurité moyenne située à Drummondville, des complices ont réussi à livrer le 24 juillet 2014 un colis qui contenait « 650 grammes de tabac, 260 grammes de marijuana, quatre paquets de papiers à rouler et une lame de scie à fer » en utilisant un drone, peut-on lire dans un rapport rédigé par un agent du service correctionnel.

Une livraison a aussi été faite le 22 mai 2014 au pénitencier Archambault, un établissement à sécurité moyenne et minimale situé à Saint-Anne-des-Plaines, selon un autre rapport.

Les autorités de l'établissement ont été avisées par les services de renseignements qu'un « colis (contrebande) avait été lancé dans une cour extérieure à l'aide d'un engin téléguidé (drone) ».

Une vaste opération de fouille a été lancée, de sorte qu'il a fallu isoler les prisonniers dans leur cellule pendant une partie de la journée. On a même fait appel à des maîtres-chiens pour débusquer les destinataires du colis. Mais ces « fouilles minutieuses » ont été vaines. « Aucune substance n'a été trouvée. »

Des incidents semblables ont été recensés à la prison de Cowansville, en septembre 2014, à l'établissement Fenbrook de Gravenhurst, en Ontario, en juillet 2013, à l'établissement Collins Bay de Kingston, en septembre 2014, et au centre de détention Grand Valley de Kitchener, un pénitencier pour femmes, en août 2013, selon nos documents.

Mesures de sécurité revues

Ce nouveau phénomène a forcé le Service correctionnel du Canada (SCC) à revoir ses mesures de sécurité dans les pénitenciers fédéraux. Mais on refuse de divulguer quelque information que ce soit à ce sujet.

« Le SCC travaille en étroite collaboration avec les services de police locaux et les collectivités pour empêcher l'introduction d'articles non autorisés dans les établissements », a indiqué Mélissa Hart, porte-parole du SCC, dans un courriel à La Presse.

« Pour des raisons de sécurité, le SCC ne peut dévoiler ni la technologie ni les détails entourant les mesures de sécurité spécifiques aux établissements fédéraux. Le SCC examine régulièrement l'utilisation d'outils de sécurité innovateurs pour améliorer sa capacité à limiter les incidents et prévenir les infractions liées à la sécurité », a-t-elle ajouté.

Chose certaine, la popularité de ces engins volants est indéniable.

Des craintes liées au terrorisme

La possibilité que des terroristes puissent utiliser ces petits engins pour commettre des attentats préoccupe les forces policières du pays, en particulier la GRC.

Dans un rapport secret obtenu par La Presse le mois dernier, la GRC relevait que des « extrémistes ont démontré qu'ils étaient prêts à utiliser des véhicules aériens sans pilote (UAV) avec fonction GPS pour effectuer de la surveillance aérienne en temps réel de cibles et pour transporter des engins explosifs artisanaux et des agents chimiques et biologiques ».

Le service de renseignement de la GRC affirmait aussi qu'« on ne peut ignorer l'utilisation éventuelle d'UAV pour commettre des attentats contre des infrastructures essentielles » au Canada.

- Avec William Leclerc

De nouveaux débouchés

Certaines entreprises voient de nouveaux débouchés pour les drones. La semaine dernière, Amazon a fait savoir qu'elle était en train de tester un système de livraison par drones en sol canadien. L'entreprise a construit des installations pour mener ces tests dans un secteur rural en Colombie-Britannique. Elle a toutefois refusé de divulguer où exactement. Transports Canada affirme avoir autorisé Amazon à installer son site de tests en décembre, ajoutant que celui-ci peut être utilisé toute l'année. Amazon espère un jour pouvoir se servir de drones pour livrer de petits colis à ses clients moins de 30 minutes après la réception d'une commande. Transports Canada soutient que le certificat délivré à Amazon n'est que l'une des quelque 1700 ententes similaires conclues l'an dernier.