L'ombre des motards planait au dessus de l'étonnant réseau de trafiquants de drogue dirigé par «le gang de l'âge d'or» démantelé mercredi par la police de Montréal.

Selon nos sources, Bruno Varin, 67 ans, aurait été très proche des fondateurs des Rockers, défunt club école des Hells Angels, et aurait jusqu'à son arrestation brassé des affaires et bénéficié de la protection des motards qui contrôlent actuellement le secteur sud-ouest de Montréal, où le réseau était surtout présent.

Peu connu, Varin aurait eu assez d'influence pour négocier avec les motards lorsque des problèmes pouvaient survenir entre eux et son réseau. Au fil des ans, il s'est retrouvé à la tête d'une organisation indépendante qui versait son dû aux motards, pour avoir le droit d'opérer sur leur territoire, un peu comme le clan Lavertue démantelé il y a quelques années, mais en beaucoup plus structurée et organisée.

Photo fournie par la police

Saisie de 123 kilos de cocaïne effectuée par les agents des services frontaliers à Sarnia en Ontario au début de mai 2014, dans le cadre de l'opération Loupe de la police de Montréal.

Beaucoup d'amis

Un autre des membres de cette organisation, Jacques Riendeau de Boucherville, serait, selon nos sources, un ancien membre des Death Messengers, un club de motards que la police considère comme sympathisant des Hells Angels. Des objets à l'effigie de ce groupe auraient été saisis dans une entreprise liée à Riendeau, un costaud de 72 ans dont une certaine ressemblance avec l'ancienne vedette américaine de la lutte Hulk Hogan fait jaser dans le milieu.

Selon nos informations, Varin aurait également des liens avec des proches de la mafia dans le sud-ouest de Montréal, et avec le crime organisé de souche irlandaise. L'un de ses coaccusés, Antonio Mariani, 52 ans de LaSalle, a été condamné à cinq ans de prison en 2003 pour une affaire d'importation de haschisch fomentée avec Donald Matticks, le fils de l'ancien chef du Gang de l'ouest, Gerald Matticks.

À la fin des années 2000, lors d'une enquête de la GRC baptisée Cynique, le nom de Varin était sorti dans une affaire de complot pour une importation de cocaïne partiellement financée par l'un des membres de la célèbre famille Dubois. Il n'a toutefois jamais été accusé pour ce complot.

Vie discrète

Détenteur, nous a-t-on dit, d'une importante fortune, possédant plusieurs immeubles et entreprises, Varin était discret et n'affichait pas sa richesse, même si cela se savait dans le milieu. Il ne se déplaçait pas avec une voiture de l'année et aurait investi largement dans les oeuvres d'art et la décoration. L'homme de 67 ans possède une maison sur le bord du lac Champlain actuellement à vendre. Il venait de s'établir dans sa nouvelle résidence du secteur Verdun où il a été arrêté mercredi, semble-t-il, alors qu'il comptait des billets sur la table de la cuisine.

Varin était visiblement un adepte de l'expression «On n'est jamais si bien servi que par soi même». Selon nos informations, il n'aurait pas hésité parfois à livrer de l'argent et rencontrer des vendeurs de stupéfiants, ce qui pourrait avoir été une erreur. Il tremperait également dans le prêt d'argent et autres activités, nous a-t-on dit.

Bruno Varin et ses coaccusés, dont les acteurs les plus importants sont âgés entre 63 et 73 ans, ont renoncé vendredi à leur enquête sur remise en liberté qui a été reportée pour la forme au début du mois de juin. Deux femmes, dont l'une n'avait rien d'une criminelle endurcie, ont été libérées en attendant la suite des procédures.

Varin et sa bande ont été arrêtés dans une enquête baptisée Loupe menée par les membres de la Division du crime organisé et des Produits de la criminalité de la police de Montréal. Le réseau aurait écoulé jusqu'à 20 kilos de cocaïne par semaine à Montréal et avait les moyens d'importer de la cocaïne d'Amérique du sud et de l'importer en Floride où elle était entreposée. La drogue était ensuite chargée et cachée dans les parois de camionnettes et franchissait la frontière en Ontario. Elle était ensuite de nouveau entreposée sur la rive sud de Montréal avant d'être vendue. Selon la police, le groupe prévoyait importer 1200 kg toujours entreposés aux États-Unis lorsqu'il a été démantelé. Au début du mois, les agents des services frontaliers ont saisi 123 kg de cocaïne importés présumément par l'organisation à Sarnia en Ontario.

Photo archives Félix O. J. Fournier, collaboration spéciale

L'opération de police de mercredi, qui a permis de démanteler le réseau de trafiquants de drogue dirigé par «le gang de l'âge d'or».