Un homme armé s'est présenté ce matin dans une garderie de Gatineau, en Outaouais. Sur place, devant les enfants, il a tiré à plusieurs reprises, tuant un employé, puis se serait suicidé. Si aucun enfant n'a été blessé lors du drame, la scène n'est pas sans rappeler d'autres homicides commis avec une arme à feu depuis quelques années. Au Québec, l'onde de choc se fait sentir dans plusieurs milieux. La Presse vous propose un survol de quelques réactions.

«Ce qui est arrivé est le pire cauchemar d'une garderie»

La garderie où a eu lieu le drame, vendredi matin, à Gatineau, est membre de l'Association des garderies privées du Québec. En entrevue avec La Presse, l'administratrice Mona Lisa Borrega a expliqué les mécanismes de sécurité en vigueur pour protéger les enfants.

«Il existe un système de contrôle des passages, qui fait en sorte que tout le monde ne peut entrer dans une garderie à sa guise. Souvent, on remet un code unique aux parents qui viennent porter et chercher leurs enfants, qui permet de déverrouiller la porte. Sur ce qui est arrivé hier, je me demande comment se fait-il que cet homme ait pu rentrer dans la garderie», se questionne Mme Borrega.

«Il faut quand même dire que pendant le drame survenu, les éducatrices ont agi rapidement et ont protégé les enfants, explique-t-elle. Au cours des prochains jours, on va appeler le conseil d'administration de l'association pour voir comment mieux encadrer les garderies et surtout protéger les enfants. Mais un fou, il peut s'en pointer partout. C'est difficile à prévoir.»

Éric Bergeron, psychologue: «Il faut créer un cocon familial de sécurité»

Les parents des enfants qui ont vécu le drame doivent d'abord définir s'ils ne sont pas eux-mêmes dépassés émotivement par la situation, avant d'intervenir auprès de leurs êtres chers, a expliqué à La Presse le psychologue Éric Bergeron.

«Comme parent, on a tendance à penser rapidement que l'enfant est traumatisé par ce genre de situation, mais ce n'est pas toujours le cas. Tout dépend de son développement cognitif», explique M. Bergeron.

Dans l'immédiat, un parent peut créer un cocon familial de qualité, qui favorise un sentiment de sécurité, pour s'assurer que l'enfant se sente épauler.

«On peut créer le cocon de sécurité en préparent un souper avec des mets que l'enfant aime particulièrement. On peut aussi faire davantage de sorties en famille, comme écouter un film tous ensemble. Il faut créer un sentiment d'unité. Si des problèmes se déclarent par la suite, et si le comportement de l'enfant a changé depuis le drame, il ne faut pas hésiter à consulter un médecin de famille», dit le psychologue.

Arme à feu, suicide et homicide: «il faut être proactif»

La rupture amoureuse est parfois particulièrement difficile à vivre chez certains hommes. Selon Bruno Marchand, directeur général de l'Association québécoise de prévention du suicide (AQPS), la société gagnerait à être plus proactive avec ceux qui vivent ces situations et qui possèdent une arme à feu.

«Il faut être vigilant et aux aguets. On devrait mettre en place des services téléphoniques qui évalue la détresse des gens, afin d'évaluer de façon systématique les tendances "homicidaires", particulièrement des hommes qui vivent des ruptures amoureuses», croit M. Marchand.

«Un registre des armes à feu n'est pas un miracle en soi, mais avec d'autres mesures, tels l'entreposage des armes, l'obligation d'un permis, on donne le ton comme quoi c'est important de resserrer le contrôle des armes», dit-il.

Selon l'AQPS, le registre canadien des armes à feu, aboli par le gouvernement fédéral conservateur, avait permis de prévenir 250 suicides et 50 homicides annuellement. L'association appuie la demande du gouvernement du Québec de créer un registre provincial des armes.

Homicides et armes à feu: «le registre est inutile»

«Créer un registre québécois des armes à feu est une pseudo solution qui n'enraye pas l'utilisation criminelle d'une arme», croit le directeur pour le Québec de l'Association canadienne des propriétaires d'armes à feu, Steve Buddo.

Farouchement opposé à la création d'un registre québécois, M. Buddo croit que le travail des policiers en amont, lorsqu'ils octroient des permis pour la possession et l'acquisition d'armes, devrait être resserré.

«Les policiers vérifient les antécédents criminels de tous ceux qui demandent un permis de possession d'armes. On pourrait resserrer ce contrôle en rendant obligatoire la déclaration de certaines maladies mentales, comme la schizophrénie ou la bipolarité, et empêcher ceux qui en sont affectés de posséder une arme», propose M. Buddo.

«Un registre des armes, c'est un coût supplémentaire inutile. Les criminels, par définition, n'obéissent pas aux lois. Un registre ne change rien aux crimes qui sont perpétrés», dit-il.

Aucune formation sur les fusillades dans les CPE

L'Association québécoise des centres de la petite enfance a plusieurs mesures de sécurité pour protéger les enfants. Toutefois, après le drame qui est survenu vendredi à Gatineau, elle ne prévoit pas de formation sur les fusillades. 

«C'est très délicat de faire des exercices préventifs aux fusillades. On ne veut pas traumatiser les enfants avec des pratiques pour des événements qui sont très peu fréquents. C'est trop intense», justifie la porte-parole de l'organisation, Geneviève Blanchard.

L'ensemble des CPE dispose d'un système de fermeture des portes munies de code secret pour les ouvrir. Seuls les parents et personnes officiellement à charge des enfants y ont accès, afin d'empêcher quiconque voudrait entrer dans une garderie de le faire sans autorisation.

La garderie dans laquelle s'est produit le drame de vendredi matin n'est pas membre de l'AQCPE, mais plutôt l'Association québécoise des garderies privées.