Pas question d'accepter au Canada des motards étrangers en remplacement des Hells Angels québécois dont le procès s'ouvrira l'hiver prochain: voilà le mot d'ordre des douaniers canadiens, qui disent avoir intercepté à la frontière un sympathisant européen de la célèbre organisation criminelle venue s'installer à Montréal.

Le dossier se transporte ce matin devant la Commission de l'immigration, où le motard tentera de convaincre le Canada de l'accueillir comme résident permanent, tandis que l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) plaidera pour son renvoi immédiat du pays.

Uwe Weser, 67 ans, membre du club de motocyclistes des Wagos de Suisse, se rendait à Montréal afin de s'y établir avec sa conjointe canadienne lorsqu'il a attiré l'attention des agents frontaliers, l'hiver dernier. Fraîchement retraité, il disait vouloir couler ici des jours paisibles après une carrière de dur labeur dans les plateformes de forage pétrolier.

À l'intérieur de ses bagages, les agents ont toutefois trouvé un t-shirt de partisan des Hells Angels britanniques, selon la preuve. Puis, dans le conteneur qu'il a fait acheminer avec ses effets personnels, une rutilante moto Harley-Davidson arborant un autocollant des Hells Angels. Parmi les contacts enregistrés dans son téléphone cellulaire, les agents ont retrouvé une foule de numéros personnels de Hells européens.

En poursuivant son enquête, l'ASFC a trouvé plusieurs photos de Weser prises lors d'événements où il a fraternisé avec des Hells européens. Sur certaines d'entre elles, il porte les couleurs des Wagos et le tristement célèbre écusson «1%», utilisé par la plupart des motards criminels, en référence aux 99% des motards qui seraient d'honnêtes citoyens.

Un enquêteur de la Sûreté du Québec a été dépêché pour faire subir au nouvel arrivant un interrogatoire en règle. Weser a confirmé que les Wagos fréquentent les Hells suisses, mais a insisté pour dire que ni lui ni aucun membre de son club n'avaient trempé dans la moindre activité criminelle. Il a d'ailleurs produit plusieurs attestations de bonne conduite à son nom, dont l'une qui est signée par la police suisse, ainsi qu'un document selon lequel les Hells Angels suisses ne seraient pas du même acabit que leurs vis-à-vis canadiens.

Il n'a cependant pas convaincu les autorités canadiennes de sa bonne foi. «Selon les informations détenues par l'ASFC, le club Wagos est une organisation criminelle qui est un groupe de sympathisants des Hells Angels. Les Hells Angels sont reconnus comme étant une organisation criminelle internationale», écrit l'Agence dans un document réclamant son expulsion immédiate.

«Tout étranger ou résident permanent peut faire l'objet d'une enquête et faire l'objet d'une mesure de renvoi, pour être membre d'une organisation qui se livre ou s'est livrée à des activités criminelles organisées», a souligné hier Véronique Lalime, porte-parole de l'ASFC.

Uwe Weser est représenté par Me Stéphane Handfield. Il plaidera devant la Commission qu'il ne peut être exclu du Canada pour de simples fréquentations et qu'aucun lien n'a été démontré avec des crimes précis.