La Société Saint-Jean-Baptiste (SSJB) de Montréal accuse les médias anglophones d'avoir instauré un climat de peur «déclencheur» de l'attentat contre le rassemblement du Parti québécois mardi soir, une sortie aussitôt dénoncée par la communauté anglophone.

L'organisation vouée à la défense du français et de la souveraineté a lancé aujourd'hui un «appel à la modération» aux médias anglophones à la suite de la fusillade ayant fait un mort et un blessé.

«L'attentat politique survenu au rassemblement du Parti Québécois le 4 septembre dernier est un acte isolé de folie, mais il a eu néanmoins un déclencheur socio-politique», écrit la SSJB. En entrevue, son président, Mario Beaulieu, affirme que les médias anglophones «doivent porter la responsabilité de ce climat de peur qui est propice à l'arrivée de ces gens là», en référence au tireur, Richard Henry Bain.

La SSJB cite en exemple le quotidien montréalais The Gazette et les journaux canadiens National Post et Globe and Mail. L'organisation souverainiste accuse ces médias de diffuser «sans retenue des commentaires carrément haineux des lecteurs qui ne se gênent pas de faire des parallèles avec les mouvements fascistes et néo-nazis». L'organisation souverainiste ajoute qu'«on traite les souverainistes québécois ou ceux qui veulent renforcer la loi 101 de franco-suprémacistes, d'intolérants, d'anglophobes, de faucons, de radicaux, d'idiots fermés d'esprit, qui veulent assimiler, détruire et qui méprisent les minorités».

Le flot de courriels haineux reçus par la SSJB depuis le début de la campagne électorale aurait considérablement augmenté, selon Mario Beaulieu, qui blâme les médias anglophones.

Paradoxalement, la SSJB indique dans son communiqué que, «pour qu'il y ait un débat démocratique et respectueux, il faut utiliser d'autres moyens de communiquer que de se culpabiliser ou de se diaboliser mutuellement.» Mario Beaulieu se défend de vouloir trouver un coupable pour la fusillade. «On n'accuse pas les médias anglophones comme tels, mais on dit que c'est assez. On ne traite pas les anglophones de xénophobes et on n'a pas à se faire traiter de la sorte. Ça crée un climat d'insécurité et de peur propice à ce genre d'événement.»

L'éditeur de la Gazette, Raymond Brassard, rejette les accusations de la SSJB. «Ça ne me surprend pas venant d'eux, mais je trouve qu'ils vont un peu loin», déplore-t-il. L'éditeur assure que son journal respecte les souverainistes même s'il ne partage pas leur projet d'indépendance. «Ça fait 40 ans qu'on est dans ce débat et on a toujours pris la même approche. On respecte le fait que le Parti québécois est arrivé au pouvoir de manière démocratique, mais on a le droit de ne pas avoir la même position» sur la souveraineté.

Préférant habituellement ne pas répondre aux sorties des «marginaux» de la SSJB, le Quebec Community Groups Network a tenu à réagir à ces accusations «inquiétantes». «Il ne faut pas faire d'un événement isolé un lien avec la communauté anglophone, même Gilles Duceppe dit ça», estime sa directrice générale, Sylvia Martin-Laforge.

L'organisation regroupant une quarantaine de groupes anglophones estime qu'autant les médias francophones et anglophones ont droit de parler des enjeux linguistiques, sans pour autant inciter à la peur. «Il faut en parler. Les médias ont, en général, parlé de la situation de la langue comme ç'a été présenté par les partis et comment les gens se sentent.»

Mardi soir, Richard Henry Bain a tenté de s'introduire avec au moins deux armes à feu dans un rassemblement de militants du Parti québécois venus célébrer leur victoire à l'élection. Bloqué à l'arrière du Métropolis, l'homme de 61 ans a ouvert le feu avec un fusil d'assaut, tuant un technicien et blessant un autre.