«Prend[s] ton gaz égal. Au moins, lui, il ne se tient pas avec la mafia comme certains ex-députés et animateurs de radio.»

Ce tweet, et d'autres de la même facture, certains même plus crus, Jean Lapierre l'a reçu le matin du 6 juin dernier, après avoir lui-même écrit «tant mieux» sur Twitter et annoncé qu'il réagirait à l'arrestation d'Amir Khadir dans sa chronique au 98,5. Or, ce genre de tweet, qui attaque son intégrité, Jean Lapierre n'en recevait pas avant que le journaliste Pierre Sormany l'associe faussement à l'entrepreneur Antonio Accurso, le 26 septembre 2011.

«Ce langage-là n'existait pas avant les événements dans mes courriels et dans mes tweets. C'est clair que la rédaction de M. Sormany a amené ce genre de langage», a soutenu M. Lapierre, hier, au procès en diffamation qu'il tient au journaliste et ex-directeur des émissions d'affaires publiques de Radio-Canada, Pierre Sormany. M. Lapierre réclame 350 000$ en dommages. Il allègue que cette affaire le hante, qu'il continue à en subir les désagréments. Sa conjointe des 23 dernières années, Nicole Beaulieu, opine. M. Lapierre a changé. Il est épuisé. Lui qui n'avait jamais pris de médicaments a eu recours à des pilules pour dormir. Elle aussi. Comme il est travailleur autonome, cette histoire lui a causé de l'insécurité financière. Jean Lapierre doit sortir, voir beaucoup de personnes aux fins de son travail. Mais selon Mme Beaulieu, ils ont réduit leurs sorties à 80%. «Les cocktails, on n'en fait plus comme avant», a-t-elle dit.

«J'avais violé toutes les règles»

Pierre Sormany, de son côté, admet qu'il a commis une faute, mais maintient qu'elle n'était pas intentionnelle, et qu'il n'a jamais voulu diffuser ses propos. C'est sa méconnaissance de Facebook qui aurait fait en sorte que le message qu'il destinait à la journaliste Lise Millette s'est répandu à plus de 300 personnes avant d'éclater au grand jour. Mme Millette voulait savoir à quel journaliste intimidateur Jacques Duchesneau avait fait allusion, sans le nommer, lors de son passage à Tout le monde en parle. M. Sormany a répondu en nommant Jean Lapierre, et en ajoutant qu'il donnait des conseils à son ami Accurso. Jean Lapierre n'avait aucun lien avec Accurso. Cela a créé de l'inquiétude à TVA et au 98,5, deux principaux clients de M. Lapierre. Ce dernier a intenté une poursuite contre M. Sormany, qui a pris sa retraite dans la foulée de cette affaire.

«J'ai pris ma retraite à cause de la faute que j'avais commise malencontreusement. Avec les responsabilités que j'avais aux émissions Enquête, et généralement aux affaires publiques, je devais m'assurer que tout ce qu'on diffusait était vérifié et rigoureux. De par mes fonctions, je n'étais pas autorisé à émettre publiquement des opinions. La diffusion de mon échange avec Lise faisait que j'avais violé toutes les règles. Il me semblait très difficile, et pour mon employeur et pour moi, de me maintenir dans ces fonctions-là. À mes yeux, ma carrière venait tout simplement de finir», a expliqué M. Sormany, hier.

Un peu plus tôt, son fils, Jean-Sylvain Sormany, qui travaille en informatique, a dit que son père n'était pas très connaisseur en informatique.

Le procès se poursuit ce matin, avec la suite du témoignage de M. Sormany. Le juge Michel Yergeau a indiqué au début du procès qu'il n'était pas un utilisateur de Facebook et de Twitter. Il prend ses notes avec la bonne vieille méthode, en écrivant à la main. M. Sormany est représenté par Me Julie Chenette, tandis que M. Lapierre est représenté par Me Jacques Jeansonne.