Tout au long de sa plaidoirie, ce matin, l'avocat de la défense Jacques Larochelle a martelé au jury que la Couronne doit prouver sa théorie de meurtre hors de tout doute raisonnable, alors que lui-même n'a qu'un «doute à planter» dans leur esprit.

«Je n'ai pas à prouver le suicide, j'ai juste à prouver que c'est peut-être un suicide», a lancé l'avocat qui représente Jacques Delisle. Il a insisté sur le fait que les jurés ne pouvaient arriver à un verdict de culpabilité s'il y a la moindre possibilité que Mme Rainville se soit suicidée.

M. Delisle, 77 ans, est accusé du meurtre prémédité de son épouse, Marie-Nicole Rainville. La femme de 71 ans, paralysée du côté droit, est morte d'une balle à la tempe gauche, le matin du 12 novembre 2009, dans le condo qu'elle occupait avec son mari, à Sillery. M. Delisle avait pris sa retraite de juge à la Cour d'appel en mai de la même année.  Il a été arrêté et accusé de meurtre en juin 2010.

Ce matin, pendant la première partie de sa plaidoirie, Me Larochelle s'est efforcé de convaincre le jury que la théorie de la Couronne n'est pas appuyée par la preuve. Il a soutenu que plusieurs témoins avaient parlé du fait que Mme Rainville était «très suicidaire», après son AVC survenu, en avril 2007. Son état s'est encore plus détérioré à partir de juillet 2009, puisqu'elle s'est fracturé une hanche. «Elle a souffert le martyre», a soutenu Me Larochelle, en précisant qu'elle avait eu trois opérations, des «chirurgies lourdes.»  Ce qui aurait encore ajouté à ses idées suicidaires.

Suicidaire parce que grandement diminuée physiquement et moralement,  mais assez forte pour s'emparer d'une arme et se tirer une balle dans la tempe en tenant le pistolet à l'envers, de sa seule main valide, la gauche. Me Larochelle explique ceci du fait que Mme Rainville sortait de deux mois de physiothérapie.

L'avocat estime par ailleurs que le meurtre ne tient pas la route. «Le passé est garant de l'avenir», a soutenu l'avocat, en signalant que M. Delisle s'était toujours bien occupé de sa femme, tout au long de sa vie, même après, quand elle était  paralysée. Certes, il avait une maîtresse, mais à 74 ans, il n'était pas un amoureux passionné et fougueux.  Il se contentait de quelques minutes «de bécotage le matin»,  avec Johanne Plamondon, sa secrétaire, et des rencontres le midi. Par ailleurs, s'il avait vraiment voulu se débarrasser de sa femme, il se serait empressé de la placer dans une résidence adaptée, à l'automne 2009. Au contraire, lui et Mme Rainville ont convenu d'un commun accord que celle-ci reviendrait à la maison. La thèse financière ne tient pas la route non plus, croit Me Larochelle. S'il s'était divorcé, M. Delisle aurait donné un million et demi à son épouse. Mais il aurait quand même conservé le même montant.

En deuxième partie de l'avant-midi, Me Larochelle s'est employé à démolir la crédibilité des experts en balistique de la défense. L'avocat pensait terminer sa plaidoirie ce midi, mais il lui reste encore au moins trois quarts d'heure. L'exercice se poursuivra donc en après-midi. Il est probable que l'horaire sera remanié, puisque les plaidoiries devaient se tenir toutes les deux aujourd'hui. Rappelons que le procès est sur les rails depuis le 7 mai dernier.