Fondée avec de maigres moyens il y a à peine trois ans par un jeune étudiant en droit, la Clinique juridique Juripop est devenue une pièce importante sur l'échiquier du conflit étudiant. L'organisme, qui représente la FECQ et la FEUCQ, poursuit sur sa lancée en prenant les rênes de la contestation juridique de la loi spéciale adoptée la semaine dernière par le gouvernement du Québec.

L'annonce officielle du dépôt de deux requêtes a été faite vendredi matin, au palais de justice de Montréal, par des porte-parole des associations étudiantes et syndicales.

«On a reçu environ 600 courriels d'avocats qui veulent nous aider. Il y en a qui nous donnent des avis juridiques, d'autres de la doctrine», a expliqué Marc-Antoine Cloutier, directeur fondateur de Juripop, cette semaine, alors que l'organisme s'affairait à mettre la dernière main à la requête. Une vingtaine d'avocats de Juripop, de groupes et d'organisations syndicales ont travaillé à la requête visant à faire invalider la loi spéciale (dite loi 78), destinée à encadrer les manifestations liées à la grève étudiante. La requête a été initiée par Léo Bureau-Blouin. Daniel Turp, «constitutionnaliste hors pair» selon M. Cloutier, a agi à titre de conseiller.

«On a de la pression, ce n'est pas quelque chose qui a un historique jurisprudentiel qui va en notre faveur. Mais les avocats sont optimistes», a confié M. Cloutier.

Chaque groupe en cause dans la requête paie ses propres avocats, explique M. Cloutier. Les intérêts de chacun peuvent diverger, et chacun peut plaider de son côté devant le juge. Au départ, différentes avenues ont été étudiées pour la contestation juridique, par exemple inscrire les 170 000 étudiants comme demandeurs. 

Pas les moyens

Qu'est-ce qui a motivé ce jeune étudiant en droit à fonder Juripop? C'est que, lors de son premier cours de droit, le professeur a dit qu'il n'aurait pas les moyens de se payer ses propres services, à cause des problèmes d'accès à la justice. Socialement engagé, M. Cloutier s'est mis à imaginer une façon de résoudre ce problème. De là est née Juripop, organisme à but non lucratif qui offre différents services juridiques ainsi que des conférences sur mesure, et qui s'adresse à ceux qui ne sont pas admissibles à l'aide juridique. On y fait du droit civil et familial, mais pas de droit criminel.

Depuis 2009, l'organisme a grandi. On pourrait même dire que, cette année, avec le conflit étudiant, il a connu la plus forte expansion de sa courte histoire. Il s'est impliqué dans toutes les étapes.

«Depuis le dépôt de la loi spéciale, et même avant, j'ai dénoncé la judiciarisation du conflit. On a publié trois communiqués de presse, on a pris position contre la loi spéciale. Notre mission politique vise à faire progresser le droit.»

Même s'il épouse manifestement la cause de ses deux fidèles clients, Marc-Antoine Cloutier ne porte pas le carré rouge, par choix stratégique.

«On a une mission militante, ce qui plaît à la FECQ et à la FEUCQ. Mais on ne veut pas envoyer le signal qu'on endosse tout ce que fait le mouvement étudiant», dit-il.