Marie-Nicole Rainville ne s'est pas suicidée, c'est quelqu'un d'autre qui a lui a tiré une balle dans la tempe gauche, le 12 novembre 2009.

C'est la conclusion que l'expert en balistique Gilbert Gravel faisait en décembre 2009, et qu'il maintient aujourd'hui, en raison de la tache de «noir de fumée» dans la main gauche de la défunte.

L'expert, qui témoignait aujourd'hui pour le ministère public au procès du juge retraité Jacques Delisle, conclut que la blessure à la tempe gauche a été faite à «bout touchant.» Comme madame ne pouvait pas se servir de sa main droite puisque celle-ci était paralysée, elle aurait donc dû se servir de sa main gauche pour se tuer. Mais alors, elle n'aurait pas cette tache noire dans la paume de la main, puisque forcément, elle aurait dû tenir l'arme. «Il fallait que la main et la tempe soient à moins de 1 cm du bout du canon», a expliqué M Gravel, aujourd'hui.

L'expert a fait différents tests, notamment avec des tirs, une tête et une main moulée en plâtre, pour prouver sa théorie. Ce qui se dégage de l'un de ces tests, c'est que madame aurait porté sa main à sa tempe gauche, peut-être pour se protéger, quand le pistolet de calibre .22 lui tirait une balle à cet endroit. Selon la démonstration, elle aurait eu la main plus ou moins par-dessus le canon du pistolet.

Par ailleurs, l'expert a aussi démontré que pour armer ce petit pistolet, il faut deux mains. Il faut d'abord mettre des balles dans le chargeur, puis il faut insérer ce chargeur dans l'arme, puis il faut tirer sur la culasse pour ensuite la relâcher, afin qu'elle mette la douille en place, prête à tirer. Finalement, il faut une pression de trois kilos pour actionner la gâchette et faire la mise à feu.

Le pistolet, on le sait, appartenait à l'époux de la défunte, Jacques Delisle. Ce dernier dit l'avoir reçue en cadeau il y a longtemps, du temps où il chassait les oiseaux migrateurs. Le jour du drame, il avait indiqué aux policiers qu'il gardait toujours son arme chargée.

Pas de sang sur l'arme

Ce matin, la biologiste judiciaire Jacynthe Prévost a pour sa part fait valoir que l'arme qui a servi à tuer Marie-Nicole Rainville aurait dû être souillée de sang. Le fait qu'elle ne l'était pas laisse supposer qu'elle a été essuyée, ce qui pourrait vouloir dire qu'une autre personne a tiré. Selon son analyse, la victime avait le visage tourné vers le dossier du canapé quand elle a été atteinte du coup de feu à la tempe gauche. La biologiste l'explique par la forme des projections de sang sur le canapé. Mme Rainville pouvait être couchée sur le dos à ce moment ou avoir le tronc légèrement tourné.

La biologiste a fait ses analyses à partir de photographies, et seulement en 2012. Elle n'est pas allée sur place au moment du drame, en 2009. L'avocat de la défense, Jacques Larochelle, s'est d'ailleurs servi de cet argument en contre-interrogatoire. Il soutient que les projections de sang sur le canapé ont plutôt été causées par des expectorations lors de l'agonie de Mme Rainville. La biologiste a répondu qu'il y avait une différence entre les gouttes de sang consécutives à un coup de feu et celles qui résultent d'expectorations.

Des gouttes d'expectorations, elle dit en avoir vu sur le collet de la victime, mais «pas sur le divan».

«Sur les PHOTOS du divan», a précisé Me Larochelle, en rappelant à la biologiste qu'elle n'était pas allée sur place. La biologiste a par ailleurs admis que l'arme a pu être essuyée par le simple fait que quelqu'un l'ait prise dans ses mains. Le jour du drame, M. Delisle avait indiqué aux policiers, qu'en trouvait sa femme morte au retour d'une course le matin du 12 novembre 2009, il avait enlevé le chargeur de l'arme pour la sécuriser. Le procès se poursuit demain avec la suite du témoignage de l'expert Gravel.