Deux ans après l'accident qui a coûté la vie à trois triathlètes sur la route 132 à Rougemont, le coroner vient de lever le voile sur la cause de l'accident: l'état de somnolence du conducteur. Dans son rapport, publié hier, il recommande d'ailleurs que Transports Canada oblige les automobilistes à équiper leurs véhicules de systèmes de détection de la perte de vigilance.

Sandra de la Garza Aguila, 36 ans, Christine Deschamps, 44 ans, et Lyn Duhamel, 39 ans, ont subi une «mort violente par polytraumatisme» le 14 mai 2010 lorsqu'une camionnette les a heurtées pendant qu'elles s'entraînaient dans le but de participer à une course Ironman. Trois autres cyclistes, également membres du club de triathlon de Saint-Lambert, ont survécu à l'accident.

Les causes de l'accident, survenu en plein jour sur une route relativement droite et dans des conditions météo avantageuses, ont toujours été nébuleuses. La Sûreté du Québec a toujours été avare de détails sur l'affaire et n'a jamais déposé d'accusations contre l'automobiliste de 29 ans.

Dans son rapport, le coroner André Dandavino explique que les victimes ont été projetées au moins 30 mètres dans les airs avant de glisser au sol sur une distance de 22 mètres. Avant l'impact, le conducteur roulait à 105 km/h et le régulateur de vitesse était enclenché.

«Un bruit qui était un premier impact avec un cycliste à 9h55 a éveillé son attention et il a alors dirigé son véhicule vers la voie de gauche, heurtant dans sa trajectoire deux autres cyclistes, puis s'est dirigé vers l'accotement pour immobiliser son véhicule. Le camion n'a jamais freiné», écrit le coroner.

Le coroner explique que le conducteur travaillait exceptionnellement de nuit depuis deux semaines dans une entreprise d'installation de systèmes de sécurité. Il aurait par ailleurs eu du mal à dormir parce que son enfant avait été malade la nuit précédente.

À la suite d'une «autorisation de recherche et de saisie du coroner, on peut confirmer que le conducteur n'était pas au téléphone cellulaire lors de l'accident. Aucun élément ne permet de croire que l'alcool, la drogue ou un problème de santé soient des facteurs à considérer».

Dans son rapport, le coroner indique que les cyclistes roulaient à la file en groupe de deux, ce qui contrevient au Code de la sécurité routière. Il recommande donc au ministère des Transports de mener des campagnes de sensibilisation à cet effet. Il recommande aussi à Québec d'asphalter l'accotement des routes à haute densité de circulation pour permettre une circulation sécuritaire des cyclistes.

Encore la fatigue

Deux survivantes de l'accident et le conjoint de l'une des victimes ne sont pas surpris des conclusions du rapport. «La fatigue est la troisième cause d'accident sur nos routes. Notre société doit avancer et prévoir des sanctions pour la fatigue au volant. Pour moi, ce n'est pas un bête accident. La fatigue peut vouloir dire que l'on n'a pas toutes ses facultés», a expliqué France Carignan, la conjointe de Christine Deschamps, elle aussi blessée dans l'accident.

Marc Flageole, conjoint de Lyn Duhamel, abonde dans son sens. «On peut tous faire des petits gestes pour conscientiser les gens à la fatigue au volant», a-t-il ajouté.

Ironie du sort, c'est aujourd'hui que les cyclistes du Québec participent au Tour du silence, un événement qui sert à commémorer les cyclistes morts dans des accidents de la route. La promenade de vélo, qui se déroule dans le silence, est parrainée cette année par Pierre Lavoie. Le point de départ est le Centre multiculturel de Boucherville.