Dans la nuit du Nouvel An, des policiers ont été appelés à intervenir à Clermont-Ferrand pour appréhender un homme de 30 ans, Wissam El-Yawni. Victime d'un malaise cardiaque à la suite de son arrestation, il est mort il y a quelques jours. Son arrestation a entraîné plusieurs nuits d'agitation dans les quartiers populaires de la ville.

Le fin mot de l'affaire reviendra aux enquêteurs de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN), qui ont été chargés du dossier dès le 2 janvier.

Connus familièrement dans le milieu comme les «boeufs-carottes» en raison de leur propension à «cuisiner» longuement les témoins, ces officiers disposent d'une longue expérience.

Ils sont appelés, comme leurs collègues parisiens de l'Inspection générale des services (IGS), à enquêter sur les fautes présumées des représentants de l'ordre, des cas mineurs de discipline jusqu'aux possibles cas de violence ou d'homicide illégal. En cas de procès, leurs conclusions peuvent être versées au dossier.

C'est le travail de ces enquêteurs qui a mené récemment à l'arrestation du directeur adjoint de la police judiciaire de Lyon dans une affaire de corruption, ainsi qu'à la mise en cause d'un autre officier dans une histoire retentissante de proxénétisme à Lille. En 2010, les deux organisations ont mené près de 1500 enquêtes judiciaires et administratives.

Pas d'«indépendance réelle», dit Amnistie internationale

Pourtant, les instances chargées de contrôler le travail des forces policières en France sont régulièrement montrées du doigt par Amnistie internationale, qui estime que les agents fautifs bénéficient d'une forme d'impunité de fait.

«La police, le ministère public et les juges se montrent peu enclins à enquêter de manière approfondie sur les atteintes [aux droits de la personne] et à en poursuivre les auteurs présumés», avait déjà relevé l'organisation, qui vient de publier un autre rapport à ce sujet.

Patrick Delouvin, directeur du pôle action d'Amnistie en France, estime que l'IGS et l'IGPN ne disposent pas d'une «indépendance réelle» à l'égard de la direction de la police.

Le principal syndicat de police du pays, Unité SGP Police, reconnaît que le système en place est imparfait, mais récuse l'idée que les forces de l'ordre bénéficient d'une forme d'impunité. Yannick Danio, délégué national de l'organisation, relève qu'il n'y a pas plus de «corporatisme» dans la police nationale qu'ailleurs.

Les critiques s'inquiètent aussi de l'influence possible du monde politique sur le déroulement des enquêtes de l'IGPN et de l'IGS. Le Monde a révélé cette semaine qu'une enquête menée au sein de l'IGS avait été «truquée» au moment de l'élection présidentielle de 2007 pour écarter des officiers jugés trop proches de la gauche.