Guy Turcotte clame ne «plus être un risque pour personne», et veut sortir de l'Institut Philippe-Pinel pour suivre une psychothérapie avec le Dr Louis Morissette, car il n'a pas confiance en son médecin traitant à l'institution psychiatrique.

L'ex-cardiologue déclaré par un jury, en juillet, non-criminellement responsable du meurtre de ses deux enfants pour cause de troubles mentaux a fait ces affirmations jeudi matin devant la Commission d'examen des troubles mentaux, qui doit décider si elle peut libérer ou non l'homme.

Lors de la première journée d'audience, le 4 novembre, le psychiatre traitant de Turcotte à Pinel, le Dr Pierre Rochette, avait mentionné qu'il devait demeurer hospitalisé car il lui est impossible de comprendre ce qui l'a fait passer à l'acte, le 20 février 2009, quand il a poignardé à 46 reprises Anne-Sophie, trois ans, et Olivier, cinq ans.

Selon lui, le trouble d'adaptation décelé par les psychiatres entendus au procès ne suffisait pas à expliquer le drame. Il parlait d'un «chaînon manquant» dans sa compréhension de l'affaire et il croit que Turcotte pourrait présenter un danger si confronté de nouveau à des échecs.

Sur un ton plus affirmatif que celui, chancelant, qu'on lui a connu au procès, Turcotte a expliqué que le Dr Rochette lui a déjà suggéré de demeurer volontairement à l'institut afin qu'on puisse initier une psychothérapie valable.

«Si j'avais consenti à rester ici, ça aurait été un aveu du fait que je suis un risque important pour la société. Je ne pouvais dire oui», a-t-il argumenté.

Il a aussi promis, contrairement à ce que craint Isabelle Gaston, ne pas être une menace pour elle.

«Je n'ai pas l'intention d'entrer en contact avec eux (la famille Gaston). Ça ne serait pas profitable, ni pour eux, ni pour moi. Au procès, j'ai eu la possibilité de donner des explications, et leur douleur est encore vive. Je le comprends et ça me désole énormément», a-t-il fait valoir.

Il a indiqué qu'il souhaite sortir de Pinel pour aller vivre chez des membres de sa famille «où une chambre est montée pour lui».

Il veut poursuivre, tout en étant libéré, une psychothérapie, avec le Dr Louis Morissette, qu'il consulte en parallèle depuis le début de sa détention en 2009.

Lui et ses proches, qui ont témoigné ensuite, font peu confiance au Dr Rochette.

Réal Turcotte, le père de Guy, a clairement indiqué pourquoi les membres de la famille ont récemment refusé de rencontrer le Dr Rochette.

«Son idée était déjà faite, Guy devait rester détenu», a justifié le retraité.

Guy Turcotte a affirmé vouloir pratiquer la cardiologie à nouveau, dans plusieurs mois.

«J'aimerais recommencer à travailler et rendre service comme cardiologue», a-t-il affirmé.

Les membres de sa famille qui ont témoigné ont livré quelques informations étonnantes sur la relation qu'ils vivent avec leur frère accusé depuis qu'il a tué ses enfants.

Tous disent qu'avant ce jour fatidique, ils se donnaient surtout des nouvelles par l'entremise de Marguerite Fournier, et qu'ils n'avaient pas perçu l'ampleur de la détresse de leur frère.

«Depuis que Guy est détenu, nous avons exploité toutes les possibilités de communiquer avec lui, par téléphone, lettres ou visites», a affirmé sa mère Marguerite Fournier.

Ainsi, le frère de Guy Turcotte, Gilles, a observé chez lui un énorme changement.

«Souvent, ma fille vient avec moi voir Guy à Pinel. Il y a des affinités entre les deux, ils jouent au volleyball. Je reconnais le Guy que j'ai toujours aimé. C'est un homme changé que je retrouve avec beaucoup de plaisir», observe-t-il. Selon les Turcotte, cette proximité familiale retrouvée leur permettra de déceler facilement tout changement d'humeur chez l'homme.

Isabelle Gaston a écouté tout cela d'un air perplexe.

Elle avoue être désabusée par toutes ces procédures qui ne lui ramèneront jamais ses enfants.

«Je l'entends parler du fait qu'il va bien, qu'il renoue avec sa famille et n'est plus suicidaire. Moi, il n'y a pas encore une semaine où je ne pense pas un peu au suicide. Et je trouve que dans toute cette affaire, il ne parle pas beaucoup d'Anne-Sophie et Olivier», déplore la femme.

Elle trouve qu'il est prématuré de libérer son ex, alors qu'on n'a pas encore trouvé quel était le véritable «trouble» chez lui.

L'audience se poursuit ce vendredi, avec le témoignage des psychiatres experts embauchés par Turcotte.