Condamné à 15 mois d'emprisonnement et à une probation de deux ans pour possession de pornographie juvénile, l'ex-évêque catholique Raymond Lahey est sorti de prison aussitôt sa peine prononcée au palais de justice d'Ottawa, mercredi.

Comme le juge Kent Kirkland a accepté de compter en double les huit mois déjà passés derrière les barreaux, la peine de prison de l'ancien évêque de 71 ans est donc purgée, et il a entamé sa période de probation.

L'ancien évêque du diocèse d'Antigonish, en Nouvelle-Écosse, ne s'est pas adressé à la horde de journalistes qui l'attendait à sa sortie du palais de justice mercredi.

Le juge lui a toutefois imposé de sévères conditions de probation. Il devra notamment fournir un échantillon d'ADN et s'inscrire au registre des délinquants sexuels. Il devra aussi se soumettre à une fouille des ses ordinateurs lorsque la police le décidera. M. Lahey devra aussi se tenir loin des piscines, des garderies et des écoles.

«La tâche la plus difficile pour un juge lorsque l'on tente de déterminer une peine appropriée, c'est de trouver l'équilibre entre les valeurs fondamentales (...) tout en prenant en compte la nature de l'accusé», a expliqué le juge Kirkland.

«Cette tâche est particulièrement exigeante dans ce cas-ci. D'un côté, l'exploitation sexuelle des enfants est un crime qui commande des représailles sévères. De l'autre côté, les circonstances personnelles de l'accusé, qui a assumé la responsabilité de ses actes répréhensibles, réduit l'urgence d'une incarcération.»

Lahey avait plaidé coupable en mai dernier à une accusation d'importation de matériel de pornographie juvénile. Le septuagénaire avait alors décidé d'être emprisonné avant même que le juge ne décide de la peine.

L'ancien évêque d'Antigonish avait été épinglé à l'aéroport d'Ottawa. Des douaniers avaient découvert des milliers d'images sur son ordinateur portable et sur un appareil électronique de poche.

Parmi les 155 000 images découvertes, 588 photographies et 63 vidéos montraient de jeunes garçons se livrant à divers actes sexuels, dont certains étaient torturés ou ligotés.

La Couronne a révélé à la cour que la collection de photos pornographiques de Lahey comprenait notamment des clichés montrant de jeunes garçons portant des crucifix et des chapelets en train d'accomplir des actes sexuels, et celle d'un homme déguisé en moine qui donnait la fessée à un garçon.

En cour, un psychiatre a expliqué que Lahey n'est pas un pédophile.

Lors de son audience de détermination de la peine, le mois dernier, Lahey a offert ses excuses à l'Église ainsi qu'aux victimes de pornographie juvénile.

Lors de son arrestation, il était chancelier de l'université Saint-François-Xavier, à Antigonish, en plus d'être l'évêque de ce diocèse. Il avait contribué à la conclusion d'une entente de 15 millions $ dans un recours collectif intenté par d'anciennes victimes d'abus de la part de prêtres à Antigonish.

L'avocat de Lahey, Michael Edelson, a affirmé que la carrière de l'homme d'église est terminée. Il a contacté le Vatican l'année dernière pour démissionner de ses fonctions, mais n'a pas encore reçu de réponse.

Le procureur de la Couronne, David Elhadad, a estimé que la décision envoie le message que des peines sévères attendent ceux qui commettent des crimes liés à la pornographie juvénile.

«Les collectionneurs de ces horreurs participent activement à la menace diabolique qu'elles représentent, et sont responsables, tout autant que les producteurs, de leur augmentation», a lancé Me Elhadad.

Le diocèse d'Antigonish a émis une déclaration écrite une fois la peine annoncée.

«Cette affaire a causé beaucoup de souffrances, de déception et de colère à l'intérieur comme à l'extérieur du diocèse», a écrit l'évêque Brian Joseph Dunn.

«Les responsables ecclésiastiques sont appelés à donner le bon exemple et à faire preuve d'intégrité morale. Lorsqu'ils commettent des fautes morales graves, cela peut avoir un impact significatif sur la communauté. Et cela est spécialement le cas lorsqu'il s'agit de pornographie juvénile.»