Plongé dans un «vide affectif» depuis sa retraite, un professeur de philosophie de 62 ans a abusé d'une jeune fille de 13 ans rencontrée par l'entremise de l'internet. Patrick Roy errait sur le web à la recherche de «stimuli». L'«admiration» que lui procurait jadis l'enseignement lui manquait.

C'est du moins ce qui ressort des différents rapports d'experts déposés en preuve par la défense, vendredi, lors des plaidoiries sur la peine à imposer au sexagénaire.

La victime a tenté de se suicider lorsque l'homme qui avait 46 ans de plus qu'elle a mis fin à leur relation, a révélé la poursuite, vendredi. C'est à la suite de cette tentative de suicide que la police a été prévenue.

L'enseignant à la retraite a plaidé coupable en octobre 2010 à trois accusations de contacts sexuels sur une mineure et de leurre informatique.

L'accusé a enseigné la philosophie durant toute sa carrière au cégep et à l'université dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. À sa retraite, ce père de quatre enfants est déménagé dans le quartier Rosemont, à Montréal, avec sa nouvelle femme, une Marocaine, aussi rencontrée par l'intermédiaire de l'internet.

Or, l'homme confiera aux spécialistes chargés de l'évaluer que sa nouvelle femme ne répondait pas à ses désirs sexuels. Il a alors décidé de publier une petite annonce sur le site Kijiji «à la recherche d'une jeune écolière». La victime de 13 ans, qu'on ne peut nommer, a répondu à cette annonce.

Leur relation sera brève; du 6 au 18 février 2009. Leurs échanges de courriels déposés en preuve démontrent que l'accusé connaissait son âge. Dans l'un d'eux, il lui dit qu'ils devraient attendre qu'elle ait 14 ans pour se voir, âge du consentement sexuel au Canada. Elle tente de le rassurer. «Non, tu n'es pas pédophile. Ça clique entre nous deux. C'est ce qui est important, non?»

Dans un courriel, le professeur à la retraite dit craindre la police. «Si ça continue, ma conjointe va dire que je suis pédo à mes enfants.» Mais du même souffle, il la complimente sur sa «maturité». Ils décident de ne pas attendre ses 14 ans et se voient à deux reprises dans un motel et dans un parc où ils auront des relations sexuelles.

La jeune fille lui jure alors de garder le secret. «Mes parents ne se doutent de rien. Même pas ma psychologue», lui écrit-elle.

Aux yeux de la poursuite, l'accusé a manifestement profité de la vulnérabilité de la jeune fille. «Ça ne prend pas la tête à Papineau pour comprendre que cette enfant est troublée. Elle a dit à M. Roy qu'elle voyait un psychologue, puis elle a tenté de se suicider de peur de ce qui pourrait lui arriver», a insisté le procureur de la Couronne, Me Jean-Denis Gerols.

La poursuite a suggéré une peine de 18 mois de prison. De son côté, l'avocate de la défense, Me Nadine Touma, estime qu'un séjour de 45 fins de semaine en détention serait suffisant, soit l'équivalent de trois mois de prison.

L'accusé a lu une courte lettre au tribunal, hier, dans laquelle il a exprimé ses regrets. L'adolescente, assise dans le fond de la salle d'audience, sanglotait en silence.

Le sexagénaire présente un «risque faible» de récidive. «Il n'avait pas prévu que la retraite de l'enseignement allait le plonger dans un vide affectif», écrit le sexologue qui l'a évalué. Il a déjà entrepris une thérapie pour régler son problème de déviance sexuelle. Sa femme et l'une de ses filles l'accompagnaient d'ailleurs lors de l'audience. La directrice du département de philosophie du cégep de Jonquière a aussi écrit une lettre de recommandation déposée en preuve par la défense. Roy n'avait pas d'antécédent judiciaire.

La juge Juanita Westmoreland-Traore rendra son verdict sur la peine le 28 novembre.