Alors que la police cherche toujours l'homme tombé dans la rivière Yamaska lundi à la suite de l'affaissement d'un rang de campagne, les résidents du village pleurent déjà la disparition de «leur» chauffeur de taxi, celui qui les a presque tous déjà conduits quelque part.

L'effondrement d'une grande section du rang Grand-Chenal à Yamaska tôt lundi matin, alors qu'il faisait encore noir, a entraîné la chute de deux voitures avec trois occupants dans la rivière. Deux hommes ont réussi à rejoindre la berge.

Le chauffeur de taxi Réal Nadeau, lui, n'est jamais remonté à la surface. Les policiers ont sorti sa voiture Chrysler de l'eau lundi soir, mais elle était vide.

«C'était un gars prudent, mais les policiers m'ont dit que même eux auraient pu tomber dans le trou, dans le noir, avec l'asphalte noire», explique sa conjointe, qui s'est identifiée seulement par le prénom de Ginette, les yeux rougis par les larmes.

«Comme on a trouvé sa voiture hier, si on peut au moins le trouver aujourd'hui, ce serait fini. On espère pouvoir mettre un point à ça. Présentement, il n'y a pas de point», laisse tomber la dame, entourée de plusieurs proches.

Selon eux, l'homme de 68 ans dans un aussi imprévisible accident laissera un grand vide à Yamaska.

«Vous savez, quand il y a un seul taxi, à la campagne...lui, il était le seul. Il a conduit tout le monde! Et ce monde-là, il en a fait des amis. Bien souvent, il connaissait tellement son monde, que les gens lui disaient «Réal peux-tu venir nous chercher», et il n'avait même pas besoin de l'adresse», se souvient sa conjointe.

Ce matin, plusieurs passants marquaient une petite pause et pointaient du doigt en passant devant la maison du disparu. «Attends-tu le monsieur? Il ne viendra pas, c'est lui qui est parti avec le courant», a lancé l'un d'eux tristement.

«J'ai été à l'école avec lui dans le temps. Lui, il en a dépanné plusieurs, surtout quand ils avaient bu», se souvient Ronald Brouillard.

«C'était mon taxi préféré. Il travaillait quasiment jour et nuit, et il passait ici au moins quatre fois par jour», ajoute Denis Cardin, en fixant le trou béant apparu au milieu de la route de campagne.

«Mais qui aurait pu s'attendre à ça?», dit-il d'un air incrédule.

Le ministère des Transports croit que les pluies abondantes du week-end, provoquées par le passage de l'ouragan Irene aux États-Unis, ont pu précipiter l'affaissement du rang.

Deux bateaux de la Sûreté du Québec, aidés de plongeurs et de pompiers, continuaient leurs recherches dans la rivière ce matin.

Photoreproduction: Patrick Sanfaçon, La Presse

Réal Nadeau