Après avoir été acquitté dans une affaire d'enlèvement liée à la pègre montréalaise, puis avoir frôlé la mort dans un attentat, c'est finalement le fisc qui risque bien de rattraper Danny De Gregorio.

Considéré par la police comme un mafieux en pleine ascension, De Gregorio doit près d'un demi-million de dollars d'impôts impayés à Revenu Canada.

Le fisc veut aujourd'hui se rembourser à même l'argent saisi par la police de Montréal lors de l'arrestation du mafieux de 43 ans en 2008 pour l'enlèvement de Nino de Bartolomeis, selon un document judiciaire.

Et le fisc n'est pas le seul à lorgner cette somme. Québec aussi veut garder une portion de cet argent «teinté» par la criminalité de De Gregorio, selon un autre document.

En juin 2008, les policiers de Montréal ont saisi 130 525$ à sa résidence de la rue Baccarat à Laval, et 8000$ qui se trouvaient chez sa mère. Depuis, cet argent dort dans un compte du Bureau de lutte aux produits de la criminalité (BLPC), un bureau de procureurs spécialisés relevant du Directeur des poursuites criminelles et pénales.

Or, en octobre, la poursuite a retiré les accusations qui pesaient contre De Gregorio et sept autres présumés complices en raison du témoignage, tout en réticence, rempli de contradictions de la victime, M. de Bartolomeis.

Le BLPC s'était alors entendu avec De Gregorio pour garder la moitié de l'argent saisi et lui remettre l'autre moitié. Il ne restait plus qu'un juge entérine cette entente.

Toutefois, avant que Québec ne lui remette l'argent, «le fédéral s'en est mêlé», a indiqué l'avocat de De Gregorio, Me Loris Cavaliere, à la juge Louise Villemure, hier, lors de l'audition de la requête de Revenu Canada au palais de justice de Montréal.

En avril dernier, Revenu Canada a ainsi écrit à Québec pour mettre la main sur la totalité de la somme saisie. Trois mois plus tard, le BLPC n'avait toujours pas obtempéré, lorgnant lui-même une partie de la somme. C'est pourquoi Revenu Canada s'est tourné vers les tribunaux.

«Le BLPC ne refuse pas de remettre les sommes à Revenu Canada. On a seulement besoin d'une décision judiciaire pour déterminer qui conservera combien», explique le procureur au BLPC, Me Éric Beauparlant. L'audition de la cause se poursuivra en octobre.

Enlèvement spectaculaire

En juin 2008, De Bartolomeis avait été kidnappé sous la menace d'armes à feu près du café bar Sambuca, puis gardé toute une nuit attaché à une chaise, dans un entrepôt du quartier Rivière-des-Prairies. Comme dans les films sur la mafia, il avait été menacé et frappé pour ne pas avoir remboursé une importante dette. Il s'était évadé en brûlant ses liens, puis s'était emparé de l'arme d'un des ravisseurs. Après avoir trouvé refuge dans un dépanneur, il avait appelé la police.

Un an après avoir été soupçonné d'avoir participé à cet enlèvement, De Gregorio a été atteint de trois balles au thorax dans le stationnement d'un gymnase dans le quartier de Saint-Léonard. Il a survécu à cet attentat. De Gregorio serait un proche allié du mafioso Giuseppe De Vito, arrêté dans l'opération Colisée. Il était le parrain d'une des deux fillettes de De Vito assassinées lorsque ce dernier était en cavale. La mère des fillettes, Adèle Sorella, est accusée de les avoir tuées.