Émotion, lundi matin, au palais de justice de Québec. Au premier jour de son procès, le père Raymond-Marie Lavoie a plaidé coupable à des accusations d'agressions sexuelles. Cet ancien surveillant de dortoir au séminaire Saint-Alphonse, dans la région de Québec, était accusé d'avoir agressé 13 élèves. Après le soulagement, les victimes espèrent maintenant réparation.



«Ça faisait longtemps qu'on attendait cette reconnaissance. Cela fait des années qu'on le sait [qu'il y a eu des abus], que tout le monde le sait. Cette journée est enfin arrivée, a dit lundi France Bédard, présidente de l'Association des victimes de prêtres. Certaines victimes en sont à leur premier procès, et pour elles, voir qu'elles sont entendues leur donne beaucoup d'énergie.»

Le père Lavoie a occupé plusieurs fonctions au séminaire Saint-Alphonse. Il a fait ses 13 victimes de 1973 à 1985, alors qu'il était surveillant de dortoir. Il a plaidé coupable sous 21 chefs d'attentat à la pudeur d'une personne de sexe masculin, de grossière indécence et d'agression sexuelle. Le père Lavoie a été arrêté pour la première fois en décembre 2009. Depuis, les accusations et les victimes se sont accumulées.

«C'est une reconnaissance des faits», a dit Me Carmen Rioux, procureure aux poursuites criminelles et pénales. Raymond-Marie Lavoie est passible de 10 ans de prison. Sa peine sera déterminée le 28 octobre. Entre-temps, les victimes ont commencé lundi à exposer au juge les conséquences que ces crimes ont eues sur leurs vies.

France Bédard craint toutefois que le père Lavoie soit condamné à une peine trop clémente. «Avec le Code criminel tel que l'on a, il va pouvoir jouer au golf l'été prochain», regrette-t-elle. Autre écueil du droit québécois, selon Mme Bédard: la prescription est de trois ans pour ce type de délit, un délai bien trop court qui protège les pédophiles, explique-t-elle. «Ce n'est pas acceptable. Il faut modifier ça!» Les démarches qu'elle a entreprises en ce sens il y a un an auprès du ministre de la Justice, Jean-Marc Fournier, sont restées lettre morte.

Le procès de Raymond-Marie Lavoie n'est pas le seul contre un père rédemptoriste à Québec. Jean-Claude Bergeron, ancien supérieur provincial de la congrégation, est aussi accusé d'avoir commis des agressions contre plusieurs élèves dans les années 70 et 80. Enfin, un recours collectif contre les pères Lavoie et Bergeron et contre la congrégation a été autorisé l'automne dernier par la Cour supérieure de Québec.

«Le processus vient à peine de commencer. Il y a d'autres intimés et d'autres victimes, qui sont contentes que ce prêtre soit passé aux aveux. Il y en a d'autres qui doivent passer aux aveux», dit Carlo Tarini, directeur général de l'Association des victimes de prêtres. S'il espère une peine «substantielle» pour M. Lavoie, M. Tarini voit dans le fait qu'il ait reconnu sa culpabilité une bonne nouvelle pour les victimes.