La plus haute cour de l'Ontario a pris son jugement en délibéré, vendredi, à savoir si un juge de la Cour supérieure avait eu raison de remettre en liberté un collaborateur avoué d'al-Qaïda.

La Cour d'appel de l'Ontario a entendu les arguments du gouvernement fédéral selon lesquels le juge Christopher Speyer avait erronément décidé de suspendre les procédures d'extradition contre Abdullah Khadr.

Ottawa a argué que Khadr devrait être remis aux autorités américaines pour être poursuivi en raison d'accusations d'avoir fourni des armes à al-Qaïda au Pakistan.

Des documents déposés à la Cour par le gouvernement avant l'appel conteste l'affirmation voulant que permettre à l'accusé originaire d'Ottawa de circuler librement représenterait une menace pour la sécurité du Canada et celle de la communauté internationale.

Un avocat représentant le gouvernement a déclaré vendredi que M. Speyer avait été au-delà de sa juridiction en ordonnant la suspension.

Selon Richard Kramer, le dossier est particulièrement délicat, et il est nécessaire de trouver un équilibre entre la suspension des accusations de terrorisme et les actions du prévenu.

Le dossier américain contre Khadr, qui a été libéré en août après quatre années de détention, est basé sur trois témoignages incriminants donnés par l'accusé, soit deux au FBI et un à la Gendarmerie royale du Canada (GRC).

Le juge Speyer a décidé en août dernier que les déclarations du FBI étaient irrecevables en raison des abus subis par Khadr au cours de ses 14 mois de détention au Pakistan.

Le juge a cependant estimé que la confession faite à la GRC en décembre 2005, au retour de M. Khadr au Canada, était admissible, et suffisantes pour ordonner son extradition.

M. Speyer a malgré tout suspendu les procédures, qualifiant les Américains de «force motrice» derrière la détention de Khadr, lors de laquelle les autorités pakistanaises ne lui ont pas donné accès à un avocat et on retardé son accès à de l'aide consulaire.

Le magistrat a déclaré que les Américains avaient contrevenu à «des notions fondamentales de justice», et qu'extrader Khadr serait récompenser leur comportement.

Bien que M. Speyer ait rejeté les affirmations d'agressions sexuelles et physiques subies par Khadr, il a constaté que des agents pakistanais avaient maltraité le prisonnier et l'avait privé de sommeil.

Le camp Khadr a indiqué vendredi que le juge était dans son bon droit lorsqu'il avait ordonné la suspension des procédures, à la lumière de la «mauvaise conduite grossière» des États-Unis.

«Les abus constatés ici sont plus sérieux que dans n'importe quel autre dossier dans l'histoire du Canada», a déclaré à la cour, vendredi, l'avocat Nate Whitling.

Un autre avocat, Dennis Edney, a révélé à des journalistes que depuis sa libération en août, l'homme de 29 ans s'était marié et n'avait pas eu maille à partir avec les autorités. Vêtu d'une chemise verte et de pantalons beiges, Khadr était assis aux côtés de sa femme et regardait droit devant lui.

Khadr est le plus vieux fils du défunt Ahmad Said Khadr, qui était étroitement associé à Oussama Ben Laden et est soupçonné d'avoir amassé de l'argent pour al-Qaïda.

Son jeune frère Omar purge actuellement une peine à Guantanamo Bay pour crimes de guerre.