Quelle peine imposer à une femme de 25 ans qui a négligé et brûlé son premier enfant en 2006, si on considère le fait que madame doit accoucher au début juin de son quatrième petit?

C'est la délicate question à laquelle la juge Louise Villemure doit maintenant répondre. La juge entendait ce matin, au palais de justice de Montréal, les représentations des avocats à ce sujet. Me Julien Archambault, avocat en défense, recommandait une peine à purger dans la collectivité. La procureure de la Couronne Josée Fontaine est pour sa part d'avis que la gravité des crimes commande une peine de prison ferme. Mais étant donné que la jeune mère s'occupe des deux autres enfants qu'elle a eus depuis les incidents, et que de surcroît, elle est actuellement enceinte de six mois, Me Fontaine ne s'oppose pas à une peine à purger dans la communauté.

La jeune femme en question, que nous appellerons Sylvie, a plaidé coupable en octobre dernier à des accusations de négligence et d'abandon d'enfant dans cette affaire. Les incidents se sont produits entre juillet et octobre 2006, alors que madame résidait dans un immeuble de la rue Lajeunesse. Vers 18h30 le 8 août,un voisin trouvait un enfant de 18 mois en pleurs, sale, affamé, déshydraté et couvert de blessures, au pied d'un escalier de secours de la rue Lajeunesse. Le petit avait descendu seul les 33 marches de ce dangereux escalier. Les policiers ont été appelés. L'enfant a été amené à l'hôpital, pendant qu'une travailleuse sociale se rendait chez la mère, qui dormait sur le canapé. Elle ne semblait pas préoccupée par l'absence de son petit.

À l'hôpital, les médecins étaient contraints de laver l'enfant avant de le traiter, tellement il était sale. Sa couche n'avait pas été changée depuis longtemps. Ils ont constaté que ses brûlures, certaines anciennes et d'autres plus récentes, avaient été faites par un rond de poêle. Il a fallu lui administrer de la morphine pour le laver et le traiter, en raison des douleurs. Il appert que la mère, qui avait évolué dans le milieu des escortes, et qui consommait beaucoup de crack, n'arrivait pas à s'occuper correctement de son enfant.

La DPJ est entrée dans le dossier. On ne connaît pas les circonstances, puisque les dossiers de la DPJ sont «top secret», mais l'enfant aurait été remis à la mère après 30 jours. En octobre, en sortant de prison, le père du petit a décidé d'aller voir son fils chez madame. Il a trouvé l'enfant négligé, marchant pieds nus dans les débris d'un aquarium brisé, au milieu d'un appartement très sale. Le père a lui-même fait un signalement. Le petit a été retiré de son milieu et confié à une famille d'accueil. Il n'est jamais retourné avec la mère depuis.

Trois autres enfants

La mère s'est depuis mise en ménage avec un autre homme, avec qui elle a eu trois enfants, si on inclut celui qui doit naître en juin. Il faut ajouter à ce nombre, deux autres enfants issus d'une précédente relation de monsieur avec une autre femme. L'homme a la garde de ses deux enfants, trois fins de semaine par mois.

Monsieur a lui aussi fait de la prison, pour des affaires de drogue. Ce matin, devant la juge Villemure, il a affirmé qu'il avait cessé de consommer. La mère, qui a aussi été condamnée pour trafic de crack en 2008, affirme également ne plus consommer. Elle est en train de faire son secondaire deux, dans le cadre d'un programme pour jeunes mères en difficulté.

Son avocat a indiqué que la jeune femme avait connu une enfance marquée par la violence et l'absence de figure paternelle. Elle a elle-même été placée en famille d'accueil, puis en centres jeunesse. Elle a fait des fugues, et a évolué dans le milieu des escortes. Elle a été victime d'un viol collectif.

La juge a pris le dossier en délibéré, et elle prononcera la peine le 3 mai.