Pour avoir menacé un procureur de la Couronne de lui étamper la marque d'une batte de baseball dans le front, lors d'un procès en avril 2009, Daniel Bédard écope cinq ans de prison. Mais l'homme de 52 ans ne sera pas déclaré délinquant dangereux, ni à contrôler.

C'est la décision que le juge de la Cour supérieure Claude Champagne a rendue aujourd'hui, au palais de justice de Montréal. Le magistrat a fait valoir qu'il privilégiait les critères de dénonciation, de dissuasion et d'exemplarité, sans écarter les possibilités de réhabilitation de l'accusé.

Bédard, qui est en prison depuis cet incident de 2009, a refusé d'assister au prononcé de la peine. «J'ai pas de peine à recevoir d'un bandit», a-t-il fait valoir, avant de retourner dans les quartiers de détention. Fidèle à ses habitudes, il a toutefois pris le temps de lancer des flèches à la procureure de la Couronne qui a piloté ce dossier, Josée Lemieux, ainsi qu'à ses collègues en grève, «qui se plaignent de gagner juste 100 000$» par année.

Ce technologue en bâtiments est en guerre avec le système depuis 2005. Cela a commencé par un différend avec l'Ordre des technologues du Québec, puis avec l'Ordre des ingénieurs, ce qui lui a valu deux procès. À partir de là, les choses ont dégénéré. L'incident pour lequel il a reçu sa peine aujourd'hui, s'est produit pendant son procès avec l'Ordre des ingénieurs, au terme duquel il a d'ailleurs été déclaré coupable de harcèlement. Exaspéré par l'attitude de l'accusé, le juge lui avait imposé une peine de 54 mois. Dans la foulée de ce procès, il a été accusé de menaces et harcèlement envers le procureur de la Couronne. Au terme de ce procès, il y a un peu plus d'un an, il a été déclaré coupable par un jury. Si cela a été si long pour imposer la peine, c'est que la Couronne demandait qu'il soit déclaré délinquant dangereux ou à contrôler. Pour ce faire, il fallait obtenir des évaluations psychiatriques au sujet de Bédard.

Deux experts

L'experte de la Couronne, Dr Renée Fugère, n'a pas rencontré l'accusé, car celui-ci a refusé. En se basant sur son dossier, elle a rendu un rapport mitigé, où elle signalait qu'il représentait un risque que la société ne pourrait assumer, s'il n'était pas traité. En revanche, un traitement ouvrait la porte à une amélioration de sa condition. Le juge dit avoir écarté le rapport de l'expert retenu par Bédard lui-même, soit le Dr Pierre Mailloux, en raison du manque de rigueur. Dr Mailloux avait rencontré Bédard, mais il n'avait pas consulté le reste du dossier. Il trouvait Bédard parfaitement sain d'esprit. Le juge a opté pour une longue peine, sans les étiquettes de délinquant.

Bédard écope donc de cinq ans.