Sylvain Lafrance, vice-président des services français de Radio-Canada, a bien suivi le plan de communication établi pour faire passer son message au journaliste Paul Cauchon, le 30 janvier 2007. Mais le mot «voyou» n'apparaissait pas dans ce plan.

C'est ce qui ressort du témoignage que Guylaine Bergeron, responsable des relations publiques à Radio-Canada, a livré, hier, dans ce procès en diffamation intenté par le grand patron de l'empire Quebecor, Pierre Karl Péladeau. Ce dernier réclame 700 000$ en dommages à M. Lafrance, pour cette phrase parue dans Le Devoir: «Il (Pierre Karl Péladeau) se promène comme un voyou, et il est en train de faire dérailler un des systèmes télévisuels qui a le plus de succès dans le monde.»

«Trajectoire» d'entrevue

En janvier 2007, Quebecor venait d'annoncer qu'il suspendait ses paiements au Fonds canadien de télévision, emboîtant ainsi le pas à Shaw, un autre câblodistributeur. Ils n'étaient pas d'accord avec le fonctionnement du Fonds. Ce manque à gagner créait beaucoup d'incertitude, voire de la panique dans le milieu de la télévision. Mécontents, les dirigeants de Radio-Canada se sont réunis et ont décidé de réagir dans une entrevue. Le journaliste Paul Cauchon a été choisi, car il avait bien suivi le dossier. Mme Bergeron et M. Lafrance ont convenu préalablement entre eux d'une «trajectoire» d'entrevue, qui devait porter quatre messages: 1: Le Fonds ne donne pas d'argent à Radio-Canada, il finance les producteurs privés. 2: Vidéotron verse 18 millions au Fonds, qui en reverse autant à TVA. 3: Le caractère unilatéral de la décision de Quebecor mettait en danger l'équilibre du Fonds et 4: C'était une attaque sans respect à la loi de la radiodiffusion.

En lisant l'article du Devoir, le 31 janvier au matin, Mme Bergeron a été bien aise de constater que les quatre messages clés étaient passés. En ce qui concerne le mot «voyou», Mme Bergeron a communiqué avec M. Lafrance pour lui conseiller dans les entrevues à venir de «s'éloigner de l'individu» pour s'en tenir au geste, au comportement.

Le procès se poursuit aujourd'hui. Un expert linguiste doit venir témoigner au sujet du mot «voyou».