Un homme acquitté par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique, mercredi, après avoir passé 27 ans en prison, condamné à tort à l'époque pour les viols de huit femmes, dit qu'il n'est pas en colère même si pendant toutes ces années il a tenté de prouver son innocence.

«Cela ne me guérirait pas si je demeurais fâché», a déclaré Ivan Henry, alors qu'il jubilait en prenant dans ses bras ses deux filles, à l'extérieur de la cour, mercredi.

«J'ai des petits-enfants dont je suis très fier. J'ai un petit chien dont je m'occupe, et il est mon ami», a affirmé M. Henry.

«J'aimerais dire aux personnes qui sont toujours incarcérées, «n'abandonnez pas». Continuez à regarder vers l'avant, travaillez pour tenter de sortir et pour savoir ce qui se passe dans la société. Le monde n'est pas souillé. Nous sommes tous là pour essayer de s'entraider», a-t-il ajouté.

À l'unanimité, les trois juges ont renversé le verdict de culpabilité prononcé en 1983 contre Ivan Henry, aujourd'hui âgé de 63 ans. Dix chefs d'accusation impliquant notamment des viols à Vancouver entre mai 1981 et juin 1982 pesaient contre lui.

Le tribunal d'appel de la Colombie-Britannique a appris que de nombreuses erreurs avaient été commises par la Couronne et le juge lors du procès initial.

La Couronne a ainsi admis qu'à l'époque, des éléments de preuves n'avaient pas été divulgués à l'accusé, dont près de 30 déclarations de la police et des témoins. La Cour d'appel a aussi appris qu'il existait des preuves démontrant que l'accusé souffrait de troubles mentaux lors du procès, où il se représentait seul.

«Le juge de première instance a été fautif en donnant des instructions aux jurés selon lesquelles ils pouvaient supposer que le comportement de l'homme, qui a résisté lors de la séance d'identification aux locaux de la police du 12 mai 1982, représentait une preuve de sa conscience de culpabilité», a écrit le juge Richard Low, au nom de ses deux collègues.

Les trois juges ont appris que lors cette séance d'identification, les agents le maîtrisaient en l'empoignant par le cou pour le maintenir dans les rangs. Les victimes devaient alors choisir le coupable parmi les suspects qui se présentaient devant elles.

M. Low a affirmé que les instructions du juge aux jurés pour l'identification du suspect étaient erronées et que le procès aurait dû être déclaré nul lorsque la Couronne a abandonné ses requêtes pour des preuves similaires.

La Couronne a admis que si M. Henry devait être jugé à nouveau, il y a de fortes chances qu'un jury l'acquitterait des huit accusations de viols.

C'est la Couronne qui a demandé à la Cour d'appel de rouvrir l'affaire, l'an dernier, dans l'intérêt de la justice. M. Henry avait alors été libéré sous conditions.

Ivan Henry a trois petits-enfants âgés de 13, 15 et 16 ans. Ses deux filles, Kari Henry et Tanya Olivares, avaient une foi inébranlable en l'innocence de leur père.

«Je suis simplement ébahie, a affirmé Kari Henry à l'extérieur de la cour. Je suis très heureuse, très très heureuse, a-t-elle ajouté, la voix tremblante d'émotion. C'est un grand poids de moins sur nos épaules.»

Selon Tanya Olivares, son père est prêt à tourner la page.

«Il a su dès le premier jour qu'il était innocent, il était innocent, il savait qu'il l'était et que cela n'était qu'une question de temps», a-t-elle soutenu.