Deux ans plus tard, Moussa Daoui porte encore des traces visibles de l'agression sauvage à caractère raciste dont il a été victime au centre-ville de Montréal. Bien que ses cheveux aient repoussé, on distingue encore trois longues cicatrices qui ont nécessité 48 points de suture sur sa tête.

Vers 1h30 le 24 août 2008, le jeune homme de 22 ans marchait légèrement devant son groupe de cinq amis - tous d'origine arabe - lorsqu'il a entendu des cris. L'un de ses amis, Hadi Awada, venait de se faire poignarder dans le dos.

La première chose qu'il a sue, c'est que deux jeunes hommes inconnus aux allures de skinheads s'en prenaient maintenant à lui, a témoigné Moussa Daoui, hier au procès de l'un de ses présumés agresseurs, Julien Leclerc, au palais de justice de Montréal. Le plus maigrichon des deux l'a pris à bras-le-corps, alors que le second s'est mis à le rouer de coups, selon son récit.

Moussa Daoui n'a pas vu le couteau dans les mains du plus jeune des deux agresseurs. «J'ai compris qu'il ne m'avait pas juste donné des coups de poing quand j'ai vu du sang sur moi et que j'ai touché aux lacérations sur ma tête», a raconté la victime.

Ses présumés agresseurs ont pris la fuite en courant rue Sainte-Catherine pour finalement s'engouffrer dans un taxi où ils auraient continué à déferler leur rage sur le chauffeur noir.

Moussa Daoui dit qu'il n'a échangé aucune parole avec ses présumés agresseurs. Hier, il a formellement identifié Julien Leclerc, assis dans l'assistance, comme l'un de ses agresseurs. Il se souvient que ses deux agresseurs portaient des tatouages, sans toutefois être en mesure de les décrire.

Plus tôt dans le procès, un policier a décrit l'un des tatouages de Julien Leclerc, soit l'inscription «White Power» assez grande pour couvrir tout son bras droit. Il aurait d'autres tatouages à caractère raciste, notamment sur la poitrine.

Leclerc, 21 ans, fait face à quatre chefs d'accusation de voies de fait graves, de voies de fait et de méfait commis sur un taxi.

Son complice allégué, qui était âgé de 17 ans au moment des faits, a été condamné pour les mêmes crimes en Chambre de la jeunesse il y a plus d'un an déjà. Cette agression est «clairement un crime haineux, relié à l'origine ethnique», avait alors indiqué la juge. Au moment de son arrestation, l'accusé d'âge mineur aurait proféré des insultes à l'endroit des Arabes en les traitant notamment de «voleurs de job».

En contre-interrogatoire, l'avocate de défense, Stéphanie Carrier, a attaqué la crédibilité de la victime en mettant en lumière ses nombreux antécédents judiciaires. Moussa Daoui n'a pas nié ses antécédents criminels de possession de crack, d'introduction par effraction et d'une quinzaine de bris de conditions.

Moussa Daoui a d'ailleurs témoigné contre son présumé agresseur chaînes aux pieds. Il est incarcéré en attente d'un procès pour une histoire de violence conjugale. Ne sachant pas que son témoin était en prison, la Couronne a eu du mal à le retrouver. «On a tenté de vous retracer. Si ce n'est pas déjà fait, appelez votre mère. Elle s'inquiète beaucoup pour vous», a dit le juge Pierre Labelle à la victime après qu'elle eut fini de témoigner. Le procès de Julien Leclerc se poursuit le 24 novembre.