Alors qu'il devait être jugé pour des accusations de menaces, de harcèlement et de tentative d'extorsion envers une vieille connaissance, l'entrepreneur Paolo Catania a plutôt été libéré de ces accusations, jeudi matin, au palais de justice de Montréal.

La procureure de la Couronne, Nathalie Thibert, a expliqué cette volte-face par le fait que, à la suite d'une rencontre avec le plaignant, cette semaine, elle n'était plus en mesure de faire sa preuve.

Après une courte audience, Me Thibert a refusé de dire si ce revirement de situation était dû au fait qu'Elio Pagliarulo ne voulait plus témoigner. Elle s'est bornée à dire qu'elle ne se croyait plus en mesure «de se décharger de son fardeau», et qu'il fallait le demander au plaignant. M. Pagliarulo a indiqué à La Presse qu'il avait décidé, à la dernière minute, de ne plus témoigner.

Quoi qu'il en soit, le fait que M. Catania soit «libéré» des accusations laisse la porte ouverte pendant un an à d'autres accusations, a signalé Me Thibert.

M. Catania a eu la victoire discrète, jeudi matin. Il affichait un air grave lorsqu'il est sorti de la salle d'audience et a souri lorsqu'il est passé devant les journalistes. Son avocat, Me Pierre L'Écuyer, considère que cette affaire ne tenait pas la route et que M. Pagliarulo a voulu faire chanter M. Catania. «Une personne qui se présente un mois après... Il a été frappé le 1er août et il s'est présenté à la police le 26 août. Au début, il a dit que c'était du road rage», a résumé Me L'Écuyer avant d'ajouter qu'aucune preuve ne corroborait les dires de M. Pagliarulo.

Ce n'est pas la lecture que le ministère public a faite du dossier au départ puisque les accusations contre M. Catania ont été autorisées en septembre 2009.

Les incidents dont s'était plaint M. Pagliarulo seraient survenus entre le 1er décembre 2008 et le 20 août 2009. M. Pagliarulo disait avoir subi des menaces pour remettre une somme de 1 377 727 de dollars à une société à numéro appartenant à M. Catania. Il affirmait aussi avoir été très brutalement tabassé par des hommes de main, le 1er août 2009, au sujet de cette dette. Enfin, il affirmait que des couronnes mortuaires avaient été livrées chez son ex-femme.

Autrefois des amis

Paolo Catania, président de Construction Frank Catania, l'un des entrepreneurs en construction les plus importants au Québec, et Elio Pagliarulo, ancien propriétaire des Pâtisseries Pagel, se connaissent depuis longtemps. Ils entretiennent un litige au sujet d'une dette de 1,4 million. M. Pagliarulo soutient que M. Catania et lui s'étaient en quelque sorte associés pour prêter de l'argent à des personnes aux prises avec des problèmes de crédit et que la dette résulte de créances perdues. M. Catania affirme plutôt avoir prêté cette somme à M. Pagliarulo pour l'expansion de son entreprise. En avril 2008, M. Pagliarulo a signé devant notaire une reconnaissance de dette de 1,4 million de dollars et s'est engagé à la rembourser à raison de 3800$ par semaine. Mais, au cours de la même année, M. Pagliarulo a omis de payer. En février 2009, un jugement de la Cour supérieure l'a condamné à rembourser 1 344 490$ avec intérêts à une société à numéro appartenant à M. Catania. Quelques mois plus tard, en août 2009, il a fait faillite

Au syndic de faillite, M. Pagliarulo a affirmé que la reconnaissance de dette avait été «obtenue sous la menace» et que sa dette réelle vis-à-vis de la société 4 127 927 Canada était de 800 000$.

M. Pagliarulo ne jouit manifestement pas d'une grande crédibilité auprès du syndic, qui s'oppose d'ailleurs à ce qu'il soit libéré de sa faillite au motif qu'elle a été occasionnée par des «spéculations hasardeuses et téméraires» et par des «extravagances injustifiables» dans son mode de vie. On lui reproche également des pratiques commerciales douteuses, d'avoir trempé dans le prêt usuraire et d'y avoir perdu de l'argent.