Pendant que ses compagnons, les dromadaires Shawn et Todd, mangeaient du foin, Jonas le tigre s'est régalé de croquettes pour chats, chiens et chevaux et jouait à la «baballe» pour tromper l'ennui.

«Il avait un ballon, je le lui lançais. J'ai passé ma main à travers les barreaux de la cage, je l'ai flatté. Il n'était pas agressif», a raconté Stéphane Lavigne lorsque La Presse l'a rencontré chez lui, hier après-midi, à Saint-Edmond-de-Grantham. L'homme de 44 ans admet avoir aidé son colocataire, Mathieu Bussières, 22 ans, à prendre soin des trois bêtes qui, selon son récit, sont arrivées chez eux comme un cheveu sur la soupe.La remorque, les animaux qu'elle contenait et le camion qui la tirait avaient été subtilisés dans le stationnement d'un motel de Saint-Liboire, le matin du 18 juin. Le même soir, la remorque est arrivée chez MM. Bussières et Lavigne. Hier, le jeune Bussières a comparu au palais de justice de Saint-Hyacinthe, où il a été accusé de recel, mais non de vol. Comme il a des antécédents judiciaires, il s'est retrouvé avec deux accusations de non-respect de conditions, et la Couronne s'est opposée à sa mise en liberté.

«Je trouve ça injuste pour le jeune. Il n'a rien fait de mal», soutient M. Lavigne. Lui et le jeune Bussières, qui est un ami de son fils, habitent dans le Rang 8, à Saint-Edmond-de-Grantham. M. Lavigne, camionneur en année sabbatique, affirme qu'il vient tout juste d'emménager et que Bussières était sur le point de déménager pour aller vivre avec sa copine. En attendant ce déménagement, Lavigne avait vidé un des bâtiments de la ferme dans le but d'y entreposer ses affaires. Il a été fort déçu, le 18 juin, de constater qu'une immense remorque s'y trouvait. Il aurait alors appris que son colocataire avait accepté d'abriter la remorque pour rendre service à quelqu'un.

M. Lavigne affirme que ni un ni l'autre ne savait ce qui se trouvait dans la remorque. Ils l'ont découvert le lendemain, quand l'affaire a fait les manchettes.

Quoi qu'il en soit, MM. Bussières et Lavigne ont pris soin des animaux avec les moyens du bord. Les dromadaires ont pu se dégourdir les pattes à l'extérieur, selon M. Lavigne. «Si un hélicoptère était passé, on aurait pu les voir.» Les deux hommes avaient tout de même hâte que les bêtes partent, mais pas n'importe comment. M. Lavigne assure qu'il a dormi dans son camion, près du garage, pour être certain que personne ne viendrait faire de mal aux animaux.

Pourquoi ne pas être allé voir la police? M. Lavigne assure qu'il a menacé de le faire si les bêtes n'étaient pas rendues à leurs propriétaires. En même temps, M. Bussières et lui craignaient d'être liés à cette affaire.

Le 21 juin, en début de soirée, la remorque et son contenu se sont retrouvés dans un petit chemin du secteur, où ils ont été découverts par un jeune homme. Une récompense de 20 000$ avait été promise à qui permettrait de les retrouver. La découverte est-elle aussi fortuite qu'on le croyait?

Hier, à la Sûreté du Québec, on disait ne pas savoir si la récompense avait été remise, puisque cela relève des propriétaires des animaux. On peut toutefois s'attendre à d'autres arrestations. En ce qui concerne MM. Lavigne et Bussières, la police a surgi vers 9h mardi pour perquisitionner. «Ils ont arrêté Mathieu. Moi, ils m'ont demandé de venir au poste. J'ai fait une déposition. J'ai dit la vérité.»

M. Lavigne n'est pas encore accusé, et il ne voit pas pourquoi il le serait puisqu'il a aidé à garder les bêtes en bonne santé. Actuellement, il s'occupe d'une chèvre, d'une vingtaine d'oiseaux qu'il appelle des dindes mais qui pourraient être des pintades, de deux chats et du chien de Mathieu Bussières.