L'enquête sur l'attentat terroriste contre un appareil d'Air India en 1985 conclut que les responsables auraient dû savoir que le vol 182 était une cible terroriste probable.

Le très attendu rapport, rendu public jeudi, évoque une multitude d'erreurs commises par le gouvernement, la Gendarmerie royale du Canada et le Service canadien du renseignement de sécurité - des erreurs qui ont empêché de prévenir l'attentat.

Un ancien juge de la Cour suprême, John Major, affirme que les agences de sécurité n'étaient pas prêtes à l'éventualité d'attaques terroristes en 1985 - et que des failles dans les systèmes de sécurité du Canada persistent.

Selon M. Major, les erreurs et l'incompétence qui ont précédé l'attentat se sont aussi reproduits, pendant plusieurs années subséquentes, dans la façon dont les autorités et les gouvernements ont traité les suites de cette tragédie meurtrière.

«L'ampleur des erreurs, de l'incompétence et de l'inattention ayant précédé l'attentat s'est malheureusement reflétée de plusieurs manières pendant plusieurs années dans la manière des autorités, des gouvernements et des institutions de gérer la suite des choses», a indiqué M. Major.

L'attentat a fait 329 victimes, surtout des Canadiens d'origine indienne.

Le rapport recommande l'octroi de pouvoirs élargis au conseiller pour la sécurité nationale, afin de lui permettre de surveiller les échanges entre les services de sécurité et d'intervenir pour régler les différends.

M. Major recommande de plus d'indemniser les familles des victimes. Bien que le juge Major n'ait aucun pouvoir pour tenir imputable le gouvernement, il a pressé jeudi Ottawa de désigner un groupe indépendant devant déterminer l'ampleur des montants compensatoires à verser aux familles des victimes.

Le premier ministre Stephen Harper a accueilli favorablement ce rapport, affirmant qu'il apportera du réconfort à ceux qui souffrent toujours de la perte d'un proche et qu'il permettra de mettre en place des mesures afin d'empêcher qu'une telle tragédie ne se reproduise.

«Des enjeux sont soulevés relativement à des excuses officielles et une compensation pour les familles des victimes. Je veux clairement signifier que le gouvernement répondra positivement à ces recommandations», a dit M. Harper aux médias.

Le premier ministre ne s'est pas engagé, néanmoins, sur une série d'autres recommandations du juge visant à prévenir la répétition d'une telle tragédie. M. Harper a indiqué qu'il faudrait du temps pour étudier ces recommandations, et le ministre de la Sécurité publique, Vic Toews, a indiqué qu'il passerait possiblement «quelques mois» avant qu'Ottawa ne soit prêt à agir.

Parmi les recommandations du juge figurent combler les trous qui persistent dans la sécurité aux aéroports, particulièrement pour le transport des marchandises, et accroître les efforts de détection et de lutte au financement d'activités terroristes.

Les familles des victimes ont salué la possibilité d'excuses de la part du gouvernement.

«Je vois des excuses comme une reconnaissance publique de ce qui a mal tourné et de la responsabilité collective du côté du gouvernement d'accréditer le fait que nous, les membres des familles et les victimes, ont été ignorés pendant toutes ces années et que le système a failli», a commenté Lata Pada, qui a perdu son mari et deux filles dans l'attentat.

Plus de deux décennies après l'attentat, responsables fédéraux et avocats qui se sont présentés devant le juge étaient impénitents et avaient encore de la misère à accepter qu'ils aient fait quoi que ce soit de mal, a noté M. Major.

«Le fait est que, tout au long de cette enquête, aucun représentant du gouvernement du Canada ou d'agences fédérales n'a présenté d'excuses aux familles des victimes», a-t-il ajouté.

Le juge Major enquête sur cet attentat depuis quatre ans.