Accusé de voie de fait pour avoir prétendument giflé un élève turbulent, un ex-chauffeur d'autobus scolaire, Pierre Goudreault, nie avoir agi intentionnellement.

«Je l'ai peut-être accroché. Il est arrivé un petit contact», a reconnu l'homme de 44 ans, hier, alors qu'il témoignait pour sa défense devant le juge Pierre Labelle, au palais de justice de Montréal. Même si les élèves étaient «tannants», qu'ils lui «criaient dans les oreilles» et qu'il y avait beaucoup de problèmes de discipline dans son autobus, M.Goudreault s'est défendu d'avoir perdu patience, le 2 juin 2008. Il était environ 16h. L'accusé, qui comptait alors 33 mois d'expérience comme chauffeur d'autobus scolaire, venait de faire monter des élèves de l'école Le Plateau pour entreprendre sa route habituelle, afin de les ramener à la maison.

En sortant de la cour d'école, il a constaté que, contrairement au règlement, une jeune fille avait ouvert une fenêtre. Il est allé la fermer. Ensuite, les versions diffèrent. Un garçon de 10 ans, victime alléguée dans cette histoire, affirme avoir éclaté de rire au même moment parce que son voisin de banquette avait fait une blague. Le chauffeur lui aurait demandé pourquoi il riait, avant de le gifler très fort avec sa main droite, puis lui demander s'il en voulait «une autre». Le garçon, qui a témoigné par vidéoconférence hier, a soutenu s'être mis à pleurer, car ça lui avait fait mal. Les élèves se seraient alors mis à traiter le chauffeur de «fou», d'«imbécile» et de «fils de pute».

Les parents du garçon ont porté plainte, et M.Goudreault a été suspendu. Quelques mois plus tard, il s'est retrouvé accusé de voie de fait à cause de cette histoire. La version que le chauffeur a rendue hier est confuse. Il pense qu'il peut avoir accroché le garçon, peut-être au visage, en l'incitant à s'asseoir à sa place. Cet élève avait beaucoup de problèmes de comportement, il avait même été suspendu, a-t-il fait valoir. Mais le chauffeur a nié absolument l'avoir frappé. «S'il y a eu accrochage, c'était accidentel», a insisté M.Goudreault.

Voie de fait ou correction?

Hier, M.Goudreault s'est présenté sans avocat à son procès. Il semblait un peu dérouté, et la Cour lui a assigné un avocat pour l'assister, Me Daniel Tardif. Ce dernier a plaidé qu'il n'y avait pas d'intention criminelle dans le geste de M.Goudreault. Il a même suggéré que l'accusé, en tant que chauffeur d'autobus, était saisi de l'autorité parentale. Ce «soufflet» pourrait avoir été administré dans un but de correction.

La procureure de la Couron-ne, Annabelle Sheppard, a évacué cette possibilité. La Cour suprême a déjà décrété qu'une correction ne pouvait être administrée à la tête, a-t-elle dit. Une tape à la tête est une voie de fait, et le fait d'être avec un groupe d'enfants difficiles n'est pas une excuse. Elle considère aussi qu'en contre-interrogatoire, l'accusé a démontré qu'il perdait facilement patience. À une question qu'elle a posée à l'accusé, celui-ci a répondu: «Es-tu folle?»

Le juge Labelle rendra sa décision le 7 mai.