Décrit par la police comme l'homme le plus dangereux dans le milieu des gangs de rue à l'heure actuelle, Ducarme Joseph a écopé d'un an de prison pour une affaire de voies de fait armées survenue dans un restaurant du boulevard Saint-Laurent ainsi qu'une seconde histoire de possession d'un silencieux d'arme à feu en fin d'après-midi aujourd'hui au palais de justice de Montréal.

Or, l'homme de 41 ans pourrait sortir du centre correctionnel dès cet été s'il est libéré au tiers de sa peine. En effet, il lui reste dix mois à purger puisqu'il a passé l'équivalent de deux mois en détention préventive.

Ducarme Joseph est cet ancien chef du gang des 67 qui a échappé à un attentat qui a fait deux morts et deux blessés dans sa boutique de vêtements du Vieux-Montréal il y a un mois. Aucun suspect n'a encore été arrêté dans cette affaire. Les policiers de Montréal le soupçonnent d'ailleurs de planifier sa revanche.

Ducarme Joseph imposait sa loi dans les bars du centre-ville l'été dernier, selon son profil criminel rédigé par le SPVM et déposé en cour plus tôt dans le processus judiciaire.

Vers 1h30 du matin le 19 septembre dernier, l'accusé buvait du champagne avec ses garde-du-corps Peter Christopoulos (tué lors de la fusillade), Osborn Anthony (une tentative de meurtre l'a laissé paraplégique), Dutroy Charlotin et Stevenson Fleurant lorsqu'un conflit a éclaté.

Un portier du restaurant est alors intervenu pour calmer le jeu. Ducarme s'est fâché et a vidé le contenu de sa bouteille de champagne sur le plancher. Ses lieutenants et lui-même ont poursuivi le portier jusque dans les cuisines en lui lançant le contenu d'assiettes de clients, dont des feuilles de chou. Ducarme s'est emparé d'un poteau de métal pour frapper la victime. La scène a été captée par des caméras de surveillance.

Ni le portier ni le gérant du restaurant n'ont voulu porter plainte. Au lendemain de l'incident, les garde-du-corps de Ducarme sont retournés sur place pour intimider le gérant, selon un document déposé en cour. Des enquêteurs du groupe Éclipse, chargés de lutter contre les gangs de rue, ont eu vent de l'affaire deux semaines plus tard. Ils ont récupéré les images des caméras de surveillance avant d'arrêter Ducarme et ses garde-du-corps.

Durant leur enquête, les policiers ont aussi saisi un silencieux d'arme à feu à la résidence de Joseph et de sa conjointe, Cheryl Bailey, à Dollard-des-Ormeaux. L'homme de 41 ans a reconnu sa culpabilité, cet après-midi, aux accusations de voies de fait armées et de possession d'un dispositif prohibé (silencieux) au palais de justice de Montréal. Sa femme, aussi accusée dans l'affaire du silencieux, a été acquittée.

À sa sortie de prison, Ducarme Joseph sera sous probation pendant un an. À la lecture des conditions de probation, la procureure de la Couronne, Me Anne-Marie Otis, s'est fait reprendre par l'accusé lui-même, debout dans le box. Me Otis lui a interdit d'être en contact avec M. Christopoulos. «Il est décédé. Il est mort», a dit l'accusé, tout sourire, à la procureure qui se confondait en excuses.

Malgré le sérieux de l'affaire, le juge Jean-Pierre Boyer s'est ensuite permis une blague. Après que le ministère public eut réclamé 10 000$ des 50 000$ déposés en caution par l'accusé en raison du bris de condition, le magistrat a répliqué : «ça fait cher le chou». Ducarme a eu l'air de trouver cela drôle. «Ça nous arrive de faire de l'humour», a dit le magistrat. «C'est sûr», a répliqué Ducarme en conservant son sourire.

À sa sortie de prison, Ducarme n'aura plus le droit de mettre les pieds dans plusieurs établissements licenciés où sont survenus des incidents d'intimidation l'été dernier, soit le restaurant Buona Notte, l'hôtel W ainsi qu'aux bars Globe, Copacanana et Suco. Il lui sera également interdit à vie de posséder une arme à feu. Ses coaccusés devraient comparaître aujourd'hui pour plaider coupable à leur tour.

Au lendemain de la fusillade, Ducarme s'est fait arrêter pour bris de condition. Il sortait du bureau de l'entrepreneur en construction Antonio "Tony" Magi situé à Lachine avec l'un de ses coaccusés, Charlotin, alors qu'il ne devait pas se trouver en sa compagnie.