L'air de rien avec sa petite stature, Gérald Gallant a surtout joué de la gâchette durant la guerre entre les Hells Angels et les Rock Machine. C'est ainsi qu'il a reconnu devant le tribunal avoir perpétré, entre le 1er septembre 1996 et le 11 juillet 2002, 26 assassinats et 12 tentatives de meurtre. Ses trois autres crimes du même type ont été commis dans les années 70 et 80.

Après des années passées dans l'ombre, Gallant a repris du service à la demande de Frédéric Faucher et des Rock Machine de Québec, aux prises avec les projets d'expansion des Hells Angels pour s'emparer du trafic de drogue partout dans la province. À Montréal même, il y avait déjà plus d'un an que la guerre sévissait entre les troupes de Maurice Boucher et le clan montréalais des Rock Machine.

 

Dans les faits, c'est en 1991 que les Hells Angels ont commencé à passer le message à tous les trafiquants de drogue - motards ou autres - qu'ils avaient intérêt à s'associer à eux s'ils voulaient persévérer dans le milieu. Après maintes tentatives de trouver un règlement qui satisferait tout le monde, les Rock Machine et des gangs de trafiquants indépendants ont formé l'Alliance, un regroupement chargé d'établir un plan d'attaque destiné à contrer l'action des Hells Angels.

C'est ainsi que, le 13 juillet 1994, les membres de l'Alliance avaient formé le projet de faire exploser le local d'un club-école des Hells Angels, sur la Rive-Sud. La Sûreté du Québec a toutefois coupé court à ce sombre projet en saisissant de la dynamite et des armes dans des motels de Boucherville et d'Anjou. Au moins trois individus avaient aussi été arrêtés. Des cagoulards puissamment armés s'en étaient par ailleurs pris à Normand Robitaille, un des plus ardents partisans des Hells Angels. Une fois remis de ses blessures, celui-ci est devenu un guerrier de première ligne du puissant gang de motards.

Après une longue «réflexion collective», les Hells Angels se sont résolument mis à l'oeuvre dans les semaines suivantes en promettant d'éliminer tous ceux qui se dresseraient sur leur passage. De gré ou de force, ils invitaient tous les trafiquants à «travailler» pour eux, soit en leur fournissant de la drogue importée en quantité, soit en leur en achetant pour la revendre sur le marché. En vue de s'assurer le monopole du narcotrafic, Maurice Boucher et les Nomads ont créé ce qu'ils appelaient «la table».

En 18 mois, pendant que des hommes de main s'occupaient d'éliminer la concurrence, les Nomads ont vendu pas moins de 2188 kg de cocaïne d'une valeur de 111,5 millions de dollars. C'est sans compter la vente de 1088 kg de haschisch, comme l'a démontré l'opération Printemps 2001. L'enquête a en outre permis de découvrir que des membres et des relations des Hells Angels avaient à eux seuls acheté plus de 400 mitraillettes de type Cobray durant la guerre avec les Rock Machine. Après une courte trêve et plus de 160 morts, celle-ci s'est terminée en juin 2002 quand les policiers ont démantelé les Rock Machine/Bandidos. Il faut dire que, à ce moment, la plupart des principales têtes d'affiche du club étaient passées dans le camp des Hells Angels.