Forcés de jouer eux-mêmes aux détectives pour élucider le meurtre de leur mère en septembre dernier au Mexique, les enfants de la blogueuse québécoise Renée Wathelet craignent aujourd'hui de voir l'assassin échapper à la prison en plaidant la folie.

Guy Dubuisson, un des fils de la victime, a passé plus de 10 semaines à Isla Mujeres, au Mexique, pour comprendre ce qui s'est passé le 17 septembre dernier.

 

Ce matin-là, sa mère, Renée Wathelet, 60 ans, a été poignardée à 42 reprises dans sa copropriété située en face de la mer des Caraïbes.

José Arturo Palacios Garza, 24 ans, a été arrêté sur place alors qu'il tentait présumément de s'échapper. Il a été accusé de meurtre prémédité quelques jours plus tard, apparemment après être passé aux aveux.

Depuis, il est détenu dans une petite prison de l'île en attendant son procès.

Au fil des mois, l'accusé aurait changé plusieurs fois sa version de l'histoire. Il prétend aujourd'hui ne pas comprendre pourquoi il se trouve derrière les barreaux, soupire M. Dubuisson, joint au Mexique la semaine dernière.

Les proches de la Québécoise soupçonnent la défense de vouloir prouver que le présumé meurtrier n'était pas conscient lorsqu'il a commis son geste. Si c'est le cas, il serait libéré de toute accusation.

La Ligue mexicaine des droits de l'homme réclame aussi son acquittement pour ces motifs. «On est restés à l'abri des médias depuis le début de cette affaire pour signifier notre confiance aux autorités locales, mais on a de la difficulté aujourd'hui à obtenir un processus judiciaire adéquat», déplore le fils de 33 ans, qui mène avec son frère et sa soeur sa propre enquête pour éclaircir la mort de sa mère.

Découvertes troublantes

Depuis l'embauche, en octobre, d'un avocat qui connaît bien la justice mexicaine, les enfants de Mme Wathelet soupçonnent de nombreuses irrégularités dans le dossier, en plus d'avoir fait plusieurs découvertes troublantes au sujet du présumé meurtrier.

Ils ont découvert que José Arturo Palacios Garza serait l'auteur d'un autre meurtre d'une violence extrême, celui de sa mère, survenu moins de deux mois avant celui de la Québécoise. L'homicide aurait été commis au Texas, où l'assassin a grandi avec sa famille.

La femme de 51 ans aurait été tuée d'une dizaine de coups de marteau à la tête. Son fils aurait ensuite mis le feu à la voiture dans laquelle son corps se trouvait, avant de fuir au Mexique. Les États-Unis ont demandé l'extradition. «Quelqu'un qui tue sa mère et une autre femme sept semaines plus tard n'est peut-être pas normal, mais ça ne veut pas dire qu'il n'est pas conscient de ce qu'il fait. Il a quand même eu le réflexe de quitter les États-Unis pour trouver refuge au Mexique», souligne Guy Dubuisson.

Fait surprenant, la famille du présumé tueur collabore étroitement avec les enfants de Renée Wathelet. Elle aussi veut s'assurer que le jeune homme réponde de ses actes.

Même si les autorités locales ne l'ont pas ouvertement découragé de poursuivre ses démarches pour obtenir justice, Guy Dubuisson admet que l'enquête en cours est boiteuse.

À commencer par les nombreuses versions contradictoires de l'affaire qui circulent depuis le début, notamment dans les médias locaux, qui en font leurs choux gras. Lors de son arrestation, Palacios Garza aurait affirmé avoir assassiné Mme Wathelet pour des raisons personnelles. L'hypothèse du vol qui a mal tourné a ensuite été évoquée. Selon la dernière théorie, Palacios Garza était un gigolo mécontent parce que sa cliente refusait de le payer. Pour les proches de la victime, les scénarios d'un crime passionnel ou du gigolo semblent bien farfelus. Ils savent cependant que leur mère et le tueur se connaissaient puisque ce dernier avait une liaison avec sa meilleure amie.

Renée Wathelet n'était pas qu'une simple touriste au Mexique. Cette Canadienne d'origine belge faisait depuis des années la navette entre Montréal et la Isla Mujeres. Quelques mois avant sa mort, elle avait décidé de s'installer pour de bon dans cette île de la péninsule du Yucatan.

Figure bien connue dans le cyberespace, Renée Wathelet rédigeait d'ailleurs au moins deux blogues personnels, en plus de prendre soin des animaux errants au Mexique.

Jusqu'à présent, le présumé meurtrier a été soumis à deux évaluations psychologiques. La première lui a diagnostiqué un trouble de personnalité antisocial avec troubles schizoïdes. La seconde, des troubles neurologiques. C'est celle-là que la défense compte utiliser pour dédouaner l'assassin, redoute Guy Dubuisson.

De son côté, le ministère canadien des Affaires étrangères refuse de commenter un dossier qu'il juge confidentiel.