Les lacunes de l'enquête policière sur la mort de Fredy Villanueva sont la goutte d'eau qui a fait déborder le vase: le gouvernement ne devrait plus permettre que des policiers enquêtent sur les gestes commis par des collègues, prévient le Protecteur du citoyen.

Dans un rapport déposé hier à l'Assemblée nationale, l'ombudsman Raymonde Saint-Germain critique sans détour «l'encadrement inadéquat, l'absence d'indépendance, de transparence et l'apparence de partialité» qui entachent le mécanisme actuel d'enquête qui s'applique quand un policier commet un geste entraînant la mort ou des blessures à un citoyen.

 

La mort de M. Villanueva n'est que la dernière d'une longue liste «d'affaires» qui ont nécessité des enquêtes publiques coûteuses pour revoir les conclusions auxquelles étaient arrivés des policiers enquêtant sur leurs pairs, a expliqué Mme Saint-Germain.

Actuellement, les cas de morts dans lesquels un policier est en cause relèvent de la «politique ministérielle». L'enquête est confiée à un autre corps policier - dans l'affaire Villanueva, la Sûreté du Québec (SQ) a enquêté sur les gestes de deux patrouilleurs du Service de police de la Ville de Montréal. L'enquête avait convaincu le Directeur des poursuites criminelles et pénales, Me Louis Dionne, qu'il n'y avait pas lieu d'entamer des recours. Depuis, l'enquête publique du coroner André Perreault a mis en lumière plusieurs faits qui avaient échappé à l'enquête de la SQ.

Ce n'est pas tant le travail des policiers qui est en cause que le doute qui persiste dans la population face à leurs conclusions. Selon le Protecteur du citoyen, Québec devrait se doter d'un Bureau des enquêtes spéciales relevant du ministère de la Sécurité publique. Si un tel bureau avait existé, dans bien des cas, on aurait évité des enquêtes publiques «à grands frais», a expliqué Mme Saint-Germain.

Des civils devraient être nommé à la tête de cet organisme, mais des policiers à la retraite pourraient les appuyer dans les démarches d'enquête. Petit à petit, les civils acquerraient de l'expérience et prendraient la place des ex-policiers, a-t-elle prédit. De telles structures fonctionnent déjà en Ontario, en Alberta, de même qu'au Royaume Uni.

Le ministre de la Sécurité publique, Jacques Dupuis, a bien accueilli le rapport, soulignant être aussi préoccupé cet enjeu. Le rapport du Protecteur vient alimenter une réflexion déjà amorcée et le gouvernement, conscient du problème, compte bientôt faire des gestes, a prévenu le ministre Dupuis.