Arrêté lors de la fameuse opération antimafia de novembre 2006, le policier militaire Omar Riahi implore la clémence du juge pour avoir aidé des trafiquants du clan Rizzuto à importer de la cocaïne en soudoyant une douanière de l'aéroport Montréal-Trudeau. Pour sa part, estimant qu'il s'agit de crimes très graves, le ministère public réclame une peine de 10 ans de pénitencier.

«Je regrette ce que j'ai fait. Je voulais simplement aider un ami, Ray Kahno, et je n'ai jamais pensé aux conséquences de mes gestes», a-t-il dit avec des trémolos dans la voix, hier, lors des plaidoiries sur la sentence à imposer devant le juge Claude Millette, de la Cour du Québec. De bonne éducation, père de deux jeunes enfants, Riahi, 33 ans, s'est enrôlé dans les forces armées en vue d'entrer à la GRC ou dans la police de Montréal. Il travaille aujourd'hui comme journalier dans la construction.

 

Le 19 mai dernier, alors qu'allait commencer son procès avec quatre autres accusés, dont la douanière Nancy Cedeno, Riahi s'est reconnu coupable de complot, de gangstérisme et de corruption. C'est lui qui avait présenté la douanière au prolifique narcotrafiquant Ray Kahno, à la solde d'un clan de jeunes mafiosi déjà fort bien servis par des bagagistes et des employés de l'aéroport Montréal-Trudeau.

Grâce à des cartes de douanes pré-estampillées, les courriers transportant la drogue étaient sûrs de ne pas passer à la fouille secondaire quand ils arrivaient à la douane. Hier, lors de son témoignage, Riahi a reconnu avoir reçu 7000$ pour les cinq cartes qu'il a remises à Kahno, en 2005 et 2006. Il dit avoir partagé l'argent moitié-moitié avec Nancy Cedeno, qu'il a connue quand il a travaillé à la douane.

Tout en qualifiant de «très sophistiqué» le système imaginé par Riahi pour faciliter le passage de la drogue à la douane, l'avocat de la poursuite s'est dit préoccupé qu'un «militaire qui veut devenir policier» ait corrompu une employée de l'État pour aider un trafiquant de haut niveau comme Ray Kahno. «Il connaissait les détails de l'importation, les moyens pour la réaliser et les quantités importées», a fait valoir Me Alexandre Dalmau, en invitant le juge à écouter les conversations que la police a enregistrées à l'insu des trafiquants, à l'occasion d'une importation ratée de 9 kilos de cocaïne, en septembre 2005.

«Il aurait pu arrêter après cet échec, mais il a continué. C'est d'autant plus aggravant qu'il a agi par appât du gain. Plus choquant encore, il jouait sur deux tableaux à la fois: d'un côté, il était un agent de la paix au sein de la police militaire et de l'autre, il commettait des crimes», d'ajouter Me Dalmau. Exhibant la jurisprudence, il verrait d'un bon oeil l'imposition d'une peine de 10 ans de prison. Étant donné qu'il s'est reconnu coupable de gangstérisme, Riahi pourrait devoir purger la moitié de cette peine.

De son côté, invoquant le passé sans tache de son client, l'avocate de la défense estime qu'une peine à purger dans la communauté serait amplement suffisante. À l'en croire, Riahi a déjà eu sa leçon et ne récidivera pas. «Il aurait dû penser à sa femme et à ses enfants quand il a commis les délits. Nous, on peut penser à sa famille en lui faisant payer seul sa dette à la société. S'il va en prison, on n'est pas plus avancé, sa femme deviendra monoparentale et se retrouvera dans la misère», a plaidé Me Karine Jean-Louis. Le juge rendra sa décision le 27 janvier prochain.