Un acteur clé du scandale des commandites, le publicitaire Gilles-André Gosselin, a écopé vendredi d'une peine de prison de deux ans plus un jour pour des fraudes s'élevant au total à 655 276 $.

L'ancien président, actionnaire et administrateur de Gosselin et Associés Communications Stratégiques est apparu au palais de justice d'Ottawa abattu, les yeux rougis. Il a plaidé coupable, évitant ainsi un procès qui aurait duré des semaines, voire très probablement des mois.

«Je m'excuse et puis je suis désolé», a-t-il dit en sanglotant, après avoir entendu la juge Lise Maisonneuve prononcer sa sentence.

M. Gosselin, qui avait déjà à ses côtés deux petites valises, prendra ainsi le chemin d'un pénitencier fédéral pour des fraudes commises entre avril 1997 et février 2000.

A l'époque, il émettait directement à ses employés la directive de facturer au gouvernement fédéral le montant maximal possible, et ce, peu importe le nombre d'heures réellement travaillées.

Pour la seule année 1997, il avait facturé 3673 heures de travail au gouvernement, ce qui représente plus de 10 heures par jour pendant les 365 jours de l'année.

M. Gosselin avait d'ailleurs été interrogé à ce sujet lors de la commission d'enquête présidée par le juge John Gomery, en 2004-2005, qui a permis de faire la lumière sur les fraudes entourant le programme de commandites mis sur pied par le gouvernement libéral d'alors.

C'est entre autres cette collaboration à la commission Gomery qui lui a permis d'écoper d'une peine moins sévère que d'autres responsables des commandites.

Car la peine de deux ans et un jour imposée par le tribunal était une position commune partagée tant par la défense que par la Couronne.

Plusieurs circonstances atténuantes ont été prises en compte pour en venir à cette entente, dont sa collaboration avec le juge Gomery ainsi qu'avec les enquêteurs de la Sûreté du Québec. Le plaidoyer de culpabilité de M. Gosselin, ainsi que son absence d'antécédent judiciaire, ont également joué en sa faveur.

Son avocat, Michel Isabelle, a d'autre part souligné que son client n'avait plus d'emploi rémunérateur depuis 2002 et avait été déclaré officiellement «inapte au travail» depuis 2006, conséquence d'une dépression majeure pour laquelle il se fait toujours suivre par un médecin.

Mais la procureure de la Couronne, Jacqueline Loignon, a de son côté rappelé le caractère prémédité des fraudes d'envergure, étalées sur trois ans, avec pas moins de 81 fausses factures.

Il y a eu «abus de confiance», ainsi «qu'enrichissement au détriment des contribuables canadiens», a-t-elle noté au palais de justice.

Aucune demande de dédommagement monétaire envers le gouvernement n'a été demandée par la Couronne. M. Gosselin n'a visiblement pas la capacité de payer, ayant fait faillite en juin dernier.

S'il est libéré au sixième de sa peine, l'ex-publicitaire n'aura finalement purgé que quatre mois de sa peine d'emprisonnement.

Jean Lafleur, un autre acteur important reconnu coupable dans le dossier des commandites, a pu retrouver la liberté après avoir passé sept mois en prison, malgré une inculpation de 42 mois. Jean Brault, qui avait de son côté écopé de 30 mois d'emprisonnement ferme, a lui aussi bénéficié d'une libération au sixième de sa peine.

Gilles-André Gosselin avait fondé en 1993 son entreprise de publicité, qu'il a par la suite vendue en 1999 à Groupaction, la compagnie de Jean Brault. La production de fausses factures s'est poursuivie avec le changement de main de l'entreprise et M. Gosselin a continué d'y travailler.

Le stratagème consistait à demander à ses employés de remplir des feuilles de temps, peu importe s'ils avaient bel et bien travaillé sur le dossier. Comme le salaire horaire de M. Gosselin était plus élevé que ceux de ses employés, son nom figurait plus souvent qu'à son tour sur ces feuille de temps, d'où la moyenne irréaliste de 10 heures par jour, 365 jours par année qui avait tant fait sourciller le juge Gomery.

La peine maximale dont M. Gosselin aurait pu écoper est de 10 ans d'emprisonnement ferme.