La Ville de Deux-Montagnes cherchait déjà à se débarrasser de son chef de police, Normand Mastromatteo, quand elle a découvert, à l'automne 2003, qu'il puisait dans la «petite caisse» et faisait de fausses réclamations au service de la trésorerie.

C'est ce qu'a fait ressortir l'avocat de la défense, hier, à la reprise du procès pour fraude et abus de confiance de l'ancien directeur de la police régionale de Deux-Montagnes. Officiellement, M. Mastromatteo a été suspendu le 4 janvier 2005, avant d'être congédié un an plus tard. Dans les faits, il n'a pas vraiment repris son boulot depuis la mise au jour de toutes ces graves allégations.

Avant d'apprendre que M. Mastromatteo falsifiait des notes de frais, le directeur général de la Ville, Paul Allard, a reconnu, lors de son contre-interrogatoire, qu'il s'apprêtait à le congédier, le suspendre ou obtenir sa démission, aux motifs qu'il avait un sérieux problème d'alcool et qu'il s'absentait souvent de son travail.

Tout cela, M. Allard dit l'avoir appris au fil de rencontres et de conversations qu'il a eues avec les trois autres membres de l'état-major de la police. Dès qu'il a appris les «problèmes de boisson» de M Mastromatteo, il affirme en avoir parlé au maire du moment, Pierre-Benoît Forget. «On craignait que ça nuise à son travail, et à l'image de la Ville. C'était majeur, et il fallait trouver une solution», a-t-il dit.

Avec l'assentiment du maire, M. Allard a invité le chef de police «à prendre des vacances». À en croire le témoin, la situation a toutefois dégénéré au retour au travail de M. Mastromatteo, et ce dernier a manqué un rendez-vous hebdomadaire avec lui sans l'avertir. «J'ai appris qu'il n'était pas entré au travail depuis plusieurs jours. C'en était assez», a-t-il dit. Sur les conseils du directeur adjoint de la police, feu Martin Demers, qui soupçonnait même son chef de prendre de la cocaïne, le haut fonctionnaire a demandé à M. Mastromatteo de rencontrer un psychologue, puis un médecin. Mais les rapports de ces deux professionnels ont été négatifs.

«Ça doit vous ébranler, un chef de police qui prend de la cocaïne. Il faut qu'il l'achète quelque part, du crime organisé. C'est gros», a lancé Me Claude Olivier, en rappelant qu'il aurait alors été facile pour le témoin de congédier son client. D'où, a noté Me Olivier pour étayer sa «thèse du complot» dont aurait été victime M. Mastromatteo, l'entrée en scène des fameuses allégations de détournements de fonds.

«C'est quand Demers apprend que les tests sont négatifs qu'on parle de la petite caisse et des vols d'argent», a soumis l'avocat de la défense.

Depuis le début du procès, Me Olivier prétend être en mesure de démontrer au juge Jean Sirois, de la Cour du Québec, que les reproches adressés à l'ancien chef proviennent d'un «putsch» déguisé des membres de l'état-major de la police de Deux-Montagnes.