Déclaré coupable de quatre accusations relatives au terrorisme, jeudi, au palais de justice de Montréal, Saïd Namouh est maintenant passible d'une peine de prison à perpétuité. Cet homme de 36 ans d'origine marocaine est la première personne au Québec à être condamnée pour terrorisme, depuis que la législation a été adoptée, en décembre 2001.

«Ça démontre que la législation fonctionne», a dit le procureur de la Couronne, Dominique Dudemaine, au sujet de la loi visant à prévenir le terrorisme. «Quand le terroriste est dans l'avion, c'est trop tard. Et Namouh s'apprêtait à prendre un avion», a-t-il ajouté.

La preuve retenue contre Namouh consiste presque essentiellement en des discussions qu'il a eues sur l'internet. Il s'agissait de clavardages, mais il y avait aussi du matériel de propagande qu'il a monté et diffusé pour le Global Islamic Media Front (GIMF.) Dans un jugement de 47 pages, le juge Claude Leblond explique pourquoi, en agissant ainsi, Namouh s'est rendu coupable de complot à l'engin explosif, participation aux activités d'un groupe terroriste, facilitation des activités de ce groupe et extorsion en association avec un groupe terroriste.

Le GIMF fait la promotion du Jihad et de différentes manières pour livrer cette guerre sainte. Cela comprend des méthodes meurtrières, par exemple la fabrication d'une ceinture explosive et le choix de l'endroit où se placer dans un autobus pour provoquer le plus de morts possible. La grande question à trancher pour le juge Claude Leblond était de déterminer si le GIMF, avec lequel Namouh collaborait activement, est un groupe terroriste au sens de la loi.

Au terme de son analyse, le juge conclut que c'est le cas. «La démarche du GIMF en regard de la propagande constitue une activité terroriste en ce qu'il s'agit d'un encouragement actif», note le juge. Le magistrat ajoute que la «preuve démontre le zèle et l'enthousiasme de l'accusé dans sa participation aux différentes activités du GIMF».

Mourir en martyr

Le zèle de Namouh allait jusqu'au désir de mourir en martyr. Il complotait d'ailleurs avec un certain Mohammed Mamoud afin de commettre un attentat quelque part en Europe, selon la théorie de la poursuite, que le juge a faite sienne. La preuve à ce sujet réside dans 31 séances de clavardage que Namouh a eues, entre le 3 juin 2007 et le 9 septembre 2007. «Je cherche un autre travail qui aurait l'odeur du terrorisme, hahaha... Vraiment, mon cher frère, mon grand rêve c'est de faire le martyr à tes côtés... Je te charge de mon fils et donnez-moi une voiture pleine... Je veux aller au Maghreb pour mon fils et donner des informations à Abou-Kotada sur les emplacements des explosifs...»

Le juge relève que trois conversations du 9 septembre 2007 confirmaient le départ prochain de Namouh vers le Maghreb et l'Égypte. Il s'était d'ailleurs présenté deux fois au consulat du Maroc à Montréal, dans les jours précédents. «Il y a donc un projet pour une attaque terroriste d'envergure à l'aide d'explosifs. Tout indique qu'il s'agira d'une attaque kamikaze», signale le juge avant de conclure que Namouh fait assurément partie au complot.

Marocain d'origine, Namouh est arrivé au Québec en 2003 après avoir épousé une Québécoise beaucoup plus âgée que lui, de qui il s'est séparé par la suite. Il a obtenu sa résidence permanente et demeurait dans la région de Trois-Rivières, puis de Maskinongé. Me René Duval, avocat de Namouh, ne semblait pas très surpris de sa défaite. Il s'agissait d'une cause très difficile, a-t-il dit, principalement parce que les moyens de la Couronne étaient «scandaleusement disproportionnés» par rapport à ceux de la défense. Les plaidoiries sur la peine auront lieu le 13 novembre prochain.