Tout ce que Daniel Hébert possédait dans la vie tenait dans son sac à dos. En octobre 2007, la disparition de ce sac a mis le jeune sans-abri en furie, au point où un copain d'infortune, Matthew McGrath, et lui ont battu à mort un quinquagénaire qu'ils croyaient être le voleur.

Hier, Hébert, 25 ans, et McGrath, 27 ans, ont été condamnés à 10 ans de prison après avoir plaidé coupable à une accusation réduite d'homicide involontaire. Michel Fortier, 51 ans, a été roué de coups de pied, le 26 octobre 2007, alors qu'il dormait paisiblement à la belle étoile, adossé à une clôture, dans un stationnement du centre-ville. Il est mort quelques jours plus tard à l'hôpital, sans jamais avoir repris conscience.

 

Un témoin qui se trouvait dans un immeuble en face du stationnement en question, Vincent Gagnon, a assisté impuissant à l'agression. Il était convaincu que la victime était morte sur place, en raison de la violence. «C'était des coups de pied assez intenses à la tête et au thorax, des coups comme au soccer», a-t-il expliqué.

De fait, la soeur de la victime, Francine Fortier, a eu un choc en allant voir son frère à l'hôpital. «On ne pouvait voir que ses yeux, une oreille parce qu'elle saignait, et un lambeau de peau sur un avant-bras. Tout le reste était couvert de bandages, même sous les pieds», a raconté Mme Fortier, hier, devant le juge Fraser Martin.

L'affaire est pathétique à tous les points de vue. Les agresseurs et la victime avaient plongé dans une vie de misère en grande partie à cause d'une dépendance à la drogue et à l'alcool.

Hébert a commencé à prendre de la cocaïne à l'âge de 9 ans. Il a vécu dans la rue à partir de 15 ans. Il a touché à tout, incluant la morphine, l'héroïne, la kétamine, le PCP, le LSD, a fait valoir son avocat, Me Jean-Pierre Sharpe. Malgré sa vie déréglée, il a eu un enfant. Il a toutefois été déchu de son autorité parentale depuis son incarcération. Il aurait certains problèmes mentaux.

McGrath, originaire de la Nouvelle-Écosse, vivotait également, quêtant un coin de sofa pour dormir ou couchant carrément dehors. Il avait quelques antécédents judiciaires, mais rien en matière de violence.

En ce qui concerne la victime, l'alcool et la drogue avaient gâché sa vie, mais l'homme avait connu des accalmies. Habile, il pouvait tout faire, a dit sa soeur. Il a eu deux femmes significatives dans sa vie, avec lesquelles il a eu trois enfants. L'un de ses fils était présent au tribunal, hier.

Ces dernières années, Michel Fortier vivait apparemment en logement dans les Cantons-de-l'Est. Au cours de l'été 2007, il avait toutefois retrouvé ses vieilles habitudes au centre-ville de Montréal. Pour son plus grand malheur.

Les deux agresseurs ont présenté leurs excuses, hier matin, à la famille de la victime. Compte tenu de leur détention préventive, c'est une peine de 74 mois qui leur a été imposée à compter d'hier. Il s'agissait d'une suggestion commune des avocats des deux parties.

Signalons enfin que l'endroit où M. Fortier a été tué, un stationnement situé au sud de la rue Sainte-Catherine, était un endroit de prédilection pour les sans-abri. L'endroit a été rasé depuis.