Les collègues de la femme tuée jeudi soir par une dalle de béton qui s'est détachée d'un hôtel du centre-ville de Montréal étaient sous le choc, vendredi, au moment même où la Régie du bâtiment du Québec révélait que l'édifice n'avait pas été inspecté depuis neuf ans.

La dalle de béton, qui pesait près de 600 livres, s'est détachée du 17e étage de l'Hôtel Residence Inn Marriott, de Montréal, pour terminer sa chute sur la tête de Léa Guilbeault, qui soupait avec son mari au restaurant Mikasa Sushi Bar, qui est adjacent à l'hôtel.

Mme Guilbeault et son époux, Hani Beitinjaneh, tous deux âgés de 33 ans, célébraient l'anniversaire de la femme, née le 13 juillet. Ils étaient mariés depuis deux ans et travaillaient tous deux dans le secteur bancaire.

Une amie et collègue de Mme Guilbeault, Suzanne Carrier, a affirmé en entrevue avec La Presse Canadienne que tous ses collègues de la Caisse Desjardins étaient sous le choc.

«On n'y croit pas, on est encore incrédules qu'elle puisse ne toujours pas être là la semaine prochaine. Elle devait revenir de vacances lundi. Pour nous, c'est presque impensable que ce soit elle», a expliqué Mme Carrier, qui a appris l'identité de la victime du tragique incident en voyant une photographie de M. Beitinjaneh dans les journaux, vendredi matin.

«C'est très difficile», a-t-elle avoué, ébranlée d'avoir perdu sa voisine de bureau des cinq dernières années. «Elle était très ambitieuse, très sociable et très appréciée dans son milieu de travail.»

Mme Guilbeault était conseillère en finances personnelles et poursuivait ses études pour devenir planificatrice financière.

Son décès a été constaté sur place, jeudi soir, tandis que M. Beitinjaneh a subi d'importantes blessures aux mains, sur lesquelles serait en partie tombée la dalle. Il a de plus souffert d'un violent choc nerveux.

M. Beitinjaneh était toujours à l'hôpital, vendredi, où il devait subir d'autres interventions médicales, selon le beau-frère de son épouse.

La Régie du bâtiment du Québec (RBQ) a par ailleurs révélé, vendredi après-midi, que l'édifice qui abrite l'hôtel n'avait pas été inspecté depuis mars 2000.

Or, une inspection régulière de l'édifice, construit en 1967, aurait permis de constater des signes avant-coureurs, selon Adel Hanna, professeur de génie civil à l'Université Concordia.

«C'est beaucoup trop long», a dit M. Hanna, en entrevue téléphonique avec La Presse Canadienne.

«Je dirais que les édifices de plus de 30 ans devraient être inspectés régulièrement, tous les deux ans. Et s'il y a un quelconque signe de détérioration ou de problème potentiel, ils pourraient être inspectés tous les six mois», a-t-il expliqué, soulignant que la dalle de béton ne s'était pas détachée du bâtiment du jour au lendemain, mais sur une période de plusieurs années.

Une porte-parole de la RBQ, Christine Grant, a précisé que l'organisme ne surveillait plus les édifices sur une base annuelle, mais selon le risque que représentent certains types de bâtiments et en vertu des plaintes qui sont déposées.

«Si on avait eu une plainte sur ce type de bâtiment, on y serait allé, mais ce n'est pas le cas», a-t-elle certifié.

Tant la RBQ que le Service de sécurité incendie de Montréal ont néanmoins été catégoriques: l'entretien de l'édifice revient au propriétaire.

«Il existe une responsabilité partagée. Le propriétaire a la responsabilité de s'assurer de la sécurité et de l'entretien de son bâtiment pour qu'il soit sécuritaire», a soutenu Mme Grant.

Un porte-parole du Marriott a affirmé que la chaîne d'hôtels n'était pas propriétaire du bâtiment, mais qu'elle gérait l'établissement. La chaîne hôtelière a d'autre part exprimé ses condoléances, dans un bref communiqué, et indiqué que l'hôtel demeurerait ouvert.

L'attaché de presse du maire de Montréal Gérald Tremblay, Bernard Larin, a fait savoir que le maire ne réagirait pas à l'incident, vendredi.

Dans un communiqué diffusé jeudi soir, le maire avait lui aussi transmis ses condoléances à la famille de la victime. Il avait également indiqué avoir demandé qu'une enquête soit tenue le plus rapidement possible.

La RBQ a confirmé, par voie de communiqué vendredi après-midi, qu'elle poursuivait son enquête. Mme Grant a réitéré qu'il était pour le moment trop tôt pour avancer des hypothèses quant aux causes possibles de l'accident.