Le territoire autochtone de Kanesatake a été pris d'assaut tôt mardi matin par plus de 300 policiers, dans le cadre d'une opération visant à démanteler un réseau de production et de vente de marijuana.

Huit serres hydroponiques, dans lesquelles ont été saisis 1200 plants d'une valeur d'un million, ont été découvertes sur place et démantelées. En raison du caractère explosif de l'intervention, le territoire a été bouclé pendant la majeure partie de la journée. Les résidants ont dû se plier, la plupart de bonne grâce, à la fouille de leur véhicule pour entrer ou sortir de Kanesatake. Les journalistes, eux, ont été tenus à l'écart «pour leur propre sécurité», a expliqué un porte-parole de la Gendarmerie royale du Canada.

Cinq à six coups de feu ont été entendus pendant l'opération, «mais aucun policier n'a tiré, et il n'y a pas eu de blessés», précise la caporale Caroline Letang, de la GRC.

En quelques heures mardi matin, les policiers, provenant de la GRC, de la Sûreté du Québec et de la police des Premières Nations, ont mis le grappin sur 16 personnes, dont trois faisaient l'objet d'un mandat de perquisition. Il s'agit de résidants de Kanesatake bien connus des policiers, Gary Gabriel, Barry Simon et Vincent Daoust. Un quatrième individu, Jason Gabriel, a pu s'enfuir peu avant l'arrivée des policiers. Les personnes arrêtées devraient comparaître aujourd'hui au palais de justice de Saint-Jérôme et y être accusées de production et trafic de drogue.

Les policiers ont également saisi de l'équipement servant à la production, de la machinerie lourde et des armes de poing.

L'opération, baptisée CERRO et qui comportait 13 perquisitions, a été menée à la suite de plaintes en provenance de résidants de Kanesatake. «Nous voulons envoyer un message fort aux organisations criminelles qui font du tort aux communautés autochtones, a déclaré la caporale Letang. Nous pouvons les arrêter, où qu'elles soient.»

On ignore quelle était l'ampleur du réseau démantelé, ni quelle était la destination de la drogue produite dans les huit serres. Fait à noter, sept policiers autochtones provenant de l'extérieur de Kanesatake - le territoire a perdu son service de police en 2004 - se sont joints à l'opération. Il s'agit d'une collaboration «extrêmement rare» qu'on reverra à l'avenir, a promis Gordon McGregor, directeur de l'Association des chefs de police des Premières Nations, lors d'une conférence de presse aux bureaux de la GRC mardi après-midi.

«Nous tentons de protéger notre culture et notre langue, et le crime organisé n'a aucun avenir dans nos sociétés. Nous avons besoin de ça, de montrer que nous pouvons travailler avec la GRC, la SQ, des non-autochtones pour attaquer le crime organisé.»

M. McGregor a tenu à dénoncer les trafiquants de drogue qui utilisent les territoires autochtones pour mener leurs activités. «Ceux qui se cachent derrière les activités traditionnelles nous montrent maintenant ce qu'ils sont vraiment. Nous avons envoyé un message fort aux criminels: ils sont nocifs pour la communauté.»

Le policier autochtone estime que les sept policiers amérindiens qui ont participé à l'opération pourront maintenant utiliser cette expérience pour enquêter dans leurs propres communautés. «Ce n'est pas qu'une question d'image, c'est aussi une question d'expérience, une expérience qu'on n'a jamais eue. Nos policiers auront maintenant les outils pour mener des enquêtes comme celle-là.»