La colère n'est pas une excuse pour tenir des propos racistes, a confirmé encore une fois le Tribunal des droits de la personne. Deux Blancs l'ont appris récemment à leurs dépens: ils ont été condamnés à verser 2000$ pour avoir dit à deux Noirs de «retourner chez eux».

La justice a souvent tranché en faveur de locataires de race noire face à un propriétaire blanc qui, par exemple, avait refusé de leur louer un logement pour des raisons discriminatoires. Cette fois-ci, dans ce jugement rendu le 2 mars dernier, les locataires sont des Blancs et les propriétaires, des Noirs.

 

Les relations entre ces locataires montréalais et leurs propriétaires, un couple d'origine haïtienne qui habite à Terrebonne, n'ont jamais été harmonieuses. En juillet 2004, les propriétaires envoient aux locataires un avis de reprise de logement pour l'été suivant. Les locataires disent avoir «de forts doutes concernant les motifs de la reprise», est-il inscrit dans un jugement de la Régie du logement, mais acceptent de partir.

Un an plus tard, le propriétaire note une affiche dans la cage d'escalier de l'immeuble: «Landlords go home! Proprios retournez chez vous!» En arrière-plan du message, l'auteur avait ajouté une reproduction des drapeaux canadien et québécois.

Le propriétaire envoie à ses locataires une mise en demeure pour qu'ils l'enlèvent. Deux semaines plus tard, ses locataires lui expliquent dans une lettre que le message «n'est qu'un avertissement que vous n'étiez pas les bienvenus chez nous sans rendez-vous pris au moins 24 heures d'avance».

Devant la juge Michèle Rivet, les locataires ont réfuté toute connotation raciste à leur message. L'homme a indiqué que, pour lui, les termes «home» et «chez vous» signifient la résidence des propriétaires à Terrebonne et non pas Haïti. Quant aux drapeaux, les locataires disent les avoir ajoutés «par respect pour la fête du Canada étant le 1er juillet, et aussi, par respect pour la fête du Québec qui avait eu lieu la semaine précédente», est-il écrit dans le jugement.

Ce n'est pas ce qu'a compris le propriétaire. Pour ce dernier, le message a une connotation «haineuse» et «raciale», «parce qu'on est des propriétaires immigrants d'origine haïtienne».

La juge Rivet a donné raison aux propriétaires. «Même si les défendeurs affirment que ce qu'ils voulaient dire c'est «go home to Terrebonne et not to Haïti», ce n'est pas ce qui a été écrit sur l'affiche. Le Tribunal ne peut non plus ignorer le fait que le message ait été inscrit devant des drapeaux canadien et québécois ce qui signifie sans doute la nationalité canadienne et québécoise.»