Pour une modeste somme de 1500$, l'ancien joueur de hockey Frédérick Brind'Amour et son frère Marc-André se sont retrouvés, bien malgré eux, au coeur d'une importation de 52 kg de cocaïne que le gang des «narcotorpilles» projetait réaliser au Nouveau-Brunswick, en décembre 2004.

Comme s'il voulait soulager sa conscience, le truand québécois Pierre Tremblay s'est presque excusé, hier, au procès des deux frères Brind'Amour, de les avoir mis dans un aussi sale pétrin. Tremblay s'occupait alors de la logistique entourant la récupération de la drogue.

 

«Depuis l'âge de 11 ans, j'ai recruté des dizaines, voire des centaines de complices pour des vols de toutes sortes et des importations de drogue. À peu près 99% d'entre eux ont eu quelques jours pour réfléchir, et dire non. Les frères Brind'Amour n'ont pas eu cette option, eux...» a-t-il dit avec un air piteux.

Principal témoin à charge de la poursuite, Tremblay en était à sa deuxième journée à la barre. Il a raconté que c'est à la toute dernière minute qu'il avait fait appel à Frédérick Brind'Amour pour se joindre à l'équipe de trafiquants chargés de récupérer la cocaïne placée dans une cage grillagée sous la coque d'un navire, au port de Belledune, au Nouveau-Brunswick. «Il n'a pas su qu'il s'agissait de drogue jusqu'à ce que ça commence à aller mal», s'est-il empressé de préciser au juge Claude Parent.

Initialement, l'équipe mise sur pied par Tremblay était formée de cinq personnes. À part lui, il y avait un pilote de Zodiac, deux plongeurs, ainsi que le chauffeur d'une automobile munie d'un compartiment secret qui devait ramener la drogue à Montréal. Tôt le matin du 27 novembre 2004, tout était fin prêt pour le départ à bord de différents véhicules, quand Tremblay s'est aperçu qu'un seul de ses partenaires avait un permis de conduire valide. «Et il avait un casier long comme le bras», de préciser Tremblay, en parlant de Normand Paré, impliqué dans la guerre des motards au sein de Dark Circle, «commando de la mort» des Rock Machine.

C'est à ce moment, selon Tremblay, que l'ancien hockeyeur Frédérick Brind'Amour, qu'il a connu par l'entremise d'un garagiste de Québec, est venu à sa rescousse. «Paré a conduit une des voitures jusqu'à Québec, puis Brind'Amour a pris la relève», a relaté le témoin. À ses dires, les trois jours qu'a duré l'épopée, Brind'Amour n'a jamais été informé que le voyage au Nouveau-Brunswick consistait à récupérer de la drogue.

«J'avais tout prévu pour qu'il reste clean. Il a déjà joué professionnel au hockey, il est jeune et il avait accepté de me dépanner parce que sa blonde l'avait lâché et qu'il avait besoin d'argent», rappelle Tremblay. Après sa carrière dans les rangs juniors, Brind'Amour a été invité au camp d'entraînement des Islanders de New York, en 1998. Il a été renvoyé après une journée. L'autre gardien de la formation new-yorkaise n'était nul autre que Roberto Luongo, aujourd'hui avec les Canucks de Vancouver.

Ce n'est qu'à son retour à Québec, après l'échec de l'opération causée par le mauvais temps, que Tremblay affirme avoir parlé franchement à Brind'Amour. «Il fallait qu'il en sache un peu plus, car il avait accepté de retourner au Nouveau-Brunswick avec un plongeur pour faire une dernière tentative de récupération», a souligné l'ancien trafiquant de haut vol. Il se sentait d'autant plus mal à l'aise de dénoncer Brind'Amour que ce dernier avait demandé à son frère Marc-André de l'accompagner afin de transporter l'équipement de plongée sous-marine. Un autre sérieux contretemps les attendait: la drogue avait été saisie par la police.

Rentrés bredouilles, les frères Brind'Amour et le plongeur recruté à Gatineau se sont vu remettre un grand total de 3500$ pour leurs services. Frédérick Brind'Amour et son frère Marc-André sont accusés d'un complot dit à trois objets: importation, possession et trafic de cocaïne. Le procès se poursuit aujourd'hui avec le contre-interrogatoire de Tremblay.