Le mandat d'arrêt lancé contre Guy Lafleur était illégal, car c'est l'accusation par sommation qu'il aurait fallu utiliser. Mais ce n'est pas une raison suffisante pour arrêter le processus judiciaire, a tranché le juge Claude Parent, hier, au palais de justice de Montréal.

Ayant échoué avec sa requête en arrêt du processus judiciaire, le célèbre numéro 10 du Canadien aura donc un procès les 16 et 17 avril. Il est accusé d'avoir livré des témoignages contradictoires le 19 septembre 2007, lors d'une enquête pour la mise en liberté de son fils Mark.

 

Assis avec sa femme dans la première rangée de la salle d'audience, hier, M. Lafleur a accueilli la nouvelle sans broncher. Il est parti ensuite sans faire de commentaire aux médias. Mais son avocat, Jean-Pierre Rancourt, s'est révélé un perdant plutôt content. «C'est un excellent jugement. On a gagné à 80%. On prétendait que l'arrestation était illégale...», a fait valoir Me Rancourt, faisant allusion au fait que le juge leur avait donné raison sur ce point. Au sujet du procès, Me Rancourt a signalé que Guy Lafleur était prêt à le subir, et qu'il avait «hâte que tout soit fini».

De son côté, la procureure de la Couronne Lori Weitzman s'est dite elle aussi «bien heureuse» de la décision, puisque le procès aurait lieu.

À cause de sa notoriété

L'accusation par sommation, moins contraignante, était indiquée dans les circonstances. Toutefois, l'arrêt du processus reste un remède ultime que les tribunaux utilisent avec parcimonie. Le magistrat a étoffé sa décision de plusieurs jurisprudences, démontrant dans quelles circonstances un arrêt du processus avait été accordé après une arrestation illégale. On y retrouvait des arrestations sans mandat, le fait de ne pas avoir donné le droit à l'avocat, des détentions de plusieurs heures et parfois de deux jours...

Dans le cas de Guy Lafleur, lorsqu'il s'est présenté au poste de police le 31 janvier 2008, sa détention n'a duré que 25 minutes. D'autre part, même si le mandat était illégal, il n'a pas mis en péril l'équité du procès.

Guy Lafleur soutenait qu'avec une accusation par sommation, la nouvelle n'aurait pas fait le tour de l'Amérique comme cela s'est produit. Le juge n'est pas d'accord avec cette prétention. «Le fait que Guy Lafleur comparaisse devant la Chambre criminelle pour répondre à une accusation de témoignages contradictoires allait nécessairement faire l'objet d'innombrables reportages, peu importe le mode de comparution. La notoriété du requérant ne peut être reprochée au ministère public», a noté le juge.

L'accusation de livrer des témoignages contradictoires est rarement utilisée. C'est un crime passible d'un maximum de 14 ans de prison, mais qui ne comporte pas de peine minimum. Rappelons que le mensonge reproché à Lafleur a trait au couvre-feu imposé à son fils Mark, quand il bénéficiait de sorties de fin de semaine chez ses parents. M. Lafleur avait dit que son fils avait respecté son couvre-feu, alors qu'en réalité, il était allé coucher à l'hôtel deux soirs avec une copine.