Après avoir plaidé coupable à toutes les accusations qui pesaient sur lui, hier, Charles-Michel Vézina, considéré comme un virtuose en fabrication d'armes à feu, s'est dit prêt à montrer les rudiments du métier aux policiers de la Sûreté du Québec.

«Ils m'ont demandé si je pourrais identifier des pièces ou même aider», a expliqué M. Vézina, avant de dire qu'il était d'accord. Il faisait alors allusion aux armes, aux répliques et aux silencieux ainsi qu'aux mille et une pièces d'armes qui ont été trouvées chez lui ou dans ses «petits entrepôts», lors de perquisitions cette semaine. Normalement, les objets illégaux saisis sont détruits. Mais dans le cas présent, les policiers de la SQ voudraient bien les conserver pour un temps, dans un but éducatif. C'est ce qu'a fait valoir le procureur de la Couronne Antoine Piché, hier, à la fin de l'audience. Celui qu'on surnommait «l'armurier des Hells» n'y voit pas d'inconvénient. À 61 ans, il dit qu'il n'a pas «le goût de mourir en prison». La juge Hélène Morin a bien expliqué à M. Vézina, qui se représente lui-même, que la peine minimale dans son cas est de cinq ans de prison. Alors c'est ce qu'il demande: cinq ans. Les observations sur la peine ont été remises au 12 janvier.

 

Sa femme est libérée

L'empressement de M. Vézina à plaider coupable, deux jours seulement après son arrestation, devrait bénéficier à sa femme, Huguette Cadorette, arrêtée en même temps que lui. Celle-ci a été mise en liberté, hier, et elle sera vraisemblablement acquittée. C'est M. Vézina lui-même qui a fait cette proposition à la Couronne.

Rappelons que l'arrestation de M. Vézina, mercredi, était l'aboutissement d'une enquête amorcée en janvier dernier par la Sûreté du Québec à la suite de renseignements reçus du Bureau of Alcohol, Tobacco, Firearms and Explosives des États-Unis. En fait, M. Vézina avait attiré l'attention sur lui en achetant beaucoup de pièces d'armes à feu, ainsi que par sa grande connaissance du domaine et des règles les régissant dans différents pays.

Les policiers ont tissé un filet pour le coincer. Ce n'était pas facile, car M. Vézina exécutait toutes sortes de manoeuvres de contre-filature quand il sortait de chez lui. La SQ a donc installé un système de localisation GPS sous sa voiture, à son insu, ce qui a permis de le suivre à la trace pendant plusieurs mois et de prendre note de ses activités. Le 5 décembre, toutefois, la voiture a eu un bris, et le garagiste a découvert l'appareil. M. Vézina a d'abord cru à une bombe, et il a eu peur. Puis, il a compris que c'était un GPS, de toute évidence posé par la police, et que celle-ci était à ses trousses. Il a loué une voiture, a vidé un entrepôt et déplacé des objets. Depuis son arrestation, il aurait toutefois révélé toutes ses cachettes.

Deux condamnations

M. Vézina avait déjà été condamné deux fois dans le passé pour la fabrication d'armes. En 1998, il avait écopé de 34 mois pour la vente d'armes prohibées. Une fois sorti de prison, il a récidivé. En 2001, il a plaidé coupable en plein milieu de son procès et a écopé de 63 mois. Il est sorti de prison trois ans plus tard. On lui avait imposé une interdiction à vie de se trouver en possession d'armes ou de répliques d'armes. «C'est pour ça que je plaide coupable», a dit M. Vézina, hier. C'est lui qui a fabriqué les armes qui ont servi aux attentats contre le syndicaliste André (Dédé) Desjardins et le journaliste Michel Auger.