«Elle est morte le jour de son anniversaire, seule dans un fossé. Personne n'a eu le temps de lui souhaiter bonne fête.»

Calée dans un sofa en cuir, dans le hall de son logement de Dollard-des-Ormeaux, Clara Khudaverdian est anéantie par la mort de sa soeur aînée.

En compagnie de son frère David, elle ne veut surtout pas que la mort de sa soeur soit vaine. Leurs mots sont très durs à l'endroit du responsable de cette tragédie. «Je veux qu'il sache ce qu'il a fait et qui était ma soeur!» tonne la cadette.

Clouée dans un fauteuil roulant depuis son plus jeune âge, Anee Khudaverdian était une battante, une force de la nature qui suscitait l'admiration de ses proches. Malgré sa condition, elle ne se plaignait jamais, «sauf pour dénoncer les commerces et les trottoirs mal adaptés pour les fauteuils roulants», précise Clara Khudaverdian en esquissant un sourire.

Née au Liban, Anee et sa famille, d'origine arménienne, ont immigré ici dans les années 60. Ses parents voulaient obtenir de meilleurs soins pour leur fille. Sa vie a été une succession de visites à l'hôpital. «Elle a été opérée 22 fois dans sa vie, tout ça pour finir dans un fossé!» peste David.

La grande fierté de sa soeur était sans conteste sa fille de 7 ans, Bailey, qu'elle a eue à 40 ans, envers et contre tous. «C'était une héroïne d'avoir un enfant à cet âge. Bailey était toute sa vie», souligne Clara, étouffant des sanglots.

Après avoir été une célibataire endurcie, Anee Khudaverdian filait le parfait bonheur avec son mari, Paul Maxwell, depuis 12 ans.

Cette passionnée des animaux a travaillé pendant des années à la SPCA.

Elle était renommée dans son voisinage pour ses promenades quotidiennes en compagnie de son chien Diego.

Son fidèle compagnon a d'ailleurs été le dernier à la voir en vie. «Après l'accident, le chien a couru jusqu'à la maison. Le mari d'Anee l'a aperçu avant de voir les lumières des ambulances au bout du chemin», raconte David.

En furie, il ne comprend pas pourquoi Roger Walsh pouvait encore conduire. «Est-ce qu'on attend toujours une tragédie, une déchirure dans une famille avant d'agir?»

La famille entend suivre étroitement l'affaire. La justice a selon elle une chance en or d'envoyer un message clair à tous les Roger Walsh qui circulent sur nos routes. «Je ne peux pas imaginer une vie sans ma soeur, j'étais ses jambes», laisse tomber Clara avant de fondre en larmes de nouveau.

Quelques heures plus tôt, nous avons croisé le mari de la victime, la petite Bailey et le chien, de retour à leur résidence de la place Clément, à Pointe-des-Cascades. La maison, décorée aux couleurs de l'Halloween, est ceinturée d'une longue passerelle en bois.

Paul Maxwell, vu les circonstances, n'a pas voulu commenter les événements. «C'est très dur pour notre fille», a simplement murmuré l'homme, la voix chevrotante.

Sa petite fille trottinait candidement derrière lui, encore trop jeune pour comprendre le destin tragique qui vient de frapper sa famille.