Une femme arrive aux urgences, un requin accroché au bras. Un énorme crocodile se balade sur un terrain de golf. La fourrière tente de déloger une voiture de la famille Pierrafeu. Toutes ces histoires insolites ont un point commun: elles se passent en Floride.

Connu pour ses immenses plages et sa nature luxuriante parfois hostile, cet État du sud-est des États-Unis voit tellement de faits divers saugrenus se produire sur son territoire que les Américains ont inventé l'expression «Florida Man».

Elle est inspirée par les mots - «Un homme en Floride» - qui ouvrent ces récits improbables dans les médias: un homme en Floride découvre qu'il est blessé par balle trois jours après s'être tiré dessus; un homme en Floride s'arrache avec les dents le bout des doigts pour dissimuler ses empreintes digitales; un homme en Floride appelle la police pour se plaindre qu'il n'a plus de vodka. Et ce ne sont que les exemples les plus récents.

«Florida Man» a son propre compte Twitter, tout comme sa complice fictive aux histoires tout aussi incongrues, «Florida Woman». Un mot-clic mène tout droit vers les nombreux faits divers égrenés chaque jour sur les sites des journaux locaux.

Mais le penchant de l'«État ensoleillé» pour les faits divers extravagants n'a pas attendu l'ère d'internet.

«La Floride a commencé à se forger une réputation pour ces histoires folles dès les années 1920, quand des agents immobiliers faisaient tout ce qu'ils pouvaient pour attirer l'attention des journaux du nord» du pays, coeur du pouvoir économique et politique, explique à l'AFP le journaliste Craig Pittman, du journal local Tampa Bay Times, auteur d'Oh Miami, sur les histoires insolites qui ont fait la réputation de la Floride, présenté vendredi.

Procès-verbaux

À l'époque, les pionniers du BTP dans la région devaient faire preuve d'une grande ingéniosité pour attirer investisseurs et touristes vers les terrains marécageux du sud de la Floride, infestés de moustiques et de crocodiles.

«Ainsi en 1921, Carl Fisher, grand promoteur immobilier de Miami Beach, avait acheté un bébé éléphant appelé Rosie pour l'utiliser comme cadet quand le président Warren Harding était venu faire du golf», raconte Craig Pittman.

La photo montrant le président et l'éléphant ensemble sur un terrain de golf «était devenue virale avant même qu'on invente le terme», ajoute le journaliste.

Tant d'excentricités découlent aussi d'une réalité bien concrète: la législation.

«La Floride dispose d'une des meilleures lois sur la transparence», explique à l'AFP Barbara Petersen, présidente d'une ONG de défense de la presse et de la liberté d'expression, First Amendment Foundation.

Le contenu de tout échange ou réunion entre fonctionnaires, s'ils portent sur un sujet public, y compris les courriels, textos, photos et vidéos, est accessible aux citoyens sur demande. Et cela inclut les procès-verbaux de police.

«Cette loi facilite immensément le travail des journalistes en Floride qui écrivent des histoires insolites», témoignait Kyle Munzenrieder, blogueur pour le journal Miami New Times, il y a un an. Quand bien même autant de faits divers insolites se produiraient ailleurs aux États-Unis, un reporter aurait bien plus de mal à vérifier les informations et ces histoires auraient davantage de chance de passer inaperçu.

La loi à elle seule n'explique toutefois pas l'ampleur du phénomène «Florida Man». Les ouragans, les requins et autres bestioles grouillant dans les marécages de Floride sont aussi d'excellents protagonistes.