Le fantasme absolu des joueurs de Monopoly va se réaliser: pour les 80 ans du jeu mythique américain, de véritables euros vont entièrement remplacer les billets fictifs dans une boîte en France, et partiellement dans 79 autres.

«On a eu envie de créer une opération unique. Or, quand on interroge les Français, ils nous disent qu'ils ont envie de trouver de vrais billets dans les boîtes de Monopoly!», sourit la chef de marque du jeu chez Hasbro, Florence Gaillard.

L'opération, qui ne concerne que la France, a commencé lundi. Parmi les boîtes chanceuses, 69 compteront cinq billets de 10 euros et autant de 20 euros, une dizaine comporteront cinq billets de 20, deux billets de 50 et un billet de 100 euros, alors qu'une seule aura une banque intégralement en euros: 20 580 euros.

«On réalise le rêve des gens», résume la chef de marque. Les 80 boîtes «gagnantes» seront réparties parmi 30 000 autres, cachées dans les éditions classique, junior, électronique, «empire» et vintage, la dernière-née dont le graphisme s'inspire de l'édition originale de 1935.

Mais les chances de tomber sur une boîte gagnante sont minces: chaque année, 500 000 jeux sont vendus sur le territoire français.

Mi-janvier, dans un atelier à proximité du site de Creutzwald, dans le nord-est de la France, où sont entreposées toutes les boîtes avant leur répartition chez les revendeurs français, la mise en place de l'opération avait des allures de mission top secrète.

«Cela n'a d'abord pas été facile pour avoir les billets, qu'il a fallu discrètement convoyer», reconnaît Florence Gaillard.

Problème: les vrais billets font (très) légèrement gonfler la boîte, dont le filmage s'avère alors imparfait.

Inventé par un chômeur ruiné

Ce qui s'annonçait comme une formalité vire alors au casse-tête chinois et au jeu de patience, ou comment étaler les billets sans que les boîtes gagnantes ne montrent le moindre signe distinctif.

Quant au poids, tous les tests l'ont montré: la différence est marginale.

À 80 ans, le jeu inventé en 1935 par un chômeur américain, ruiné après la crise de 1929, se porte toujours comme un jeune homme: il s'est vendu à plus de 275 millions d'exemplaires dans le monde et est distribué dans 114 pays.

«Les règles sont simples, tout le monde les connaît, tout le monde peut jouer, c'est fédérateur», décrypte Florence Gaillard, qui jure que les procès en prosélytisme pro-capitaliste faits autrefois au jeu, qui était banni en Union soviétique, sont révolus.

Le but du jeu consiste à ruiner ses concurrents par des opérations immobilières. Le secret de la réussite du Monopoly, qui lance environ 5 nouvelles éditions en France chaque année, résiderait également dans l'immuabilité de ses règles et de ses noms de rues.

Seule exception: en 2013, le pion «fer à repasser» a été remplacé par un chat, au terme d'une consultation des internautes.

La fantaisie n'a toutefois pas entamé l'enthousiasme des joueurs: selon une étude réalisée par Hasbro, le Monopoly demeure le jeu le plus vendu au monde, le plus possédé, le plus apprécié et le plus connu des Français.