Québec a interdit à la Ville de Montréal de dévoiler la somme reçue grâce au programme de remboursement volontaire de la part des entreprises reconnaissant avoir pris part à la collusion. Les états financiers permettent toutefois d'évaluer cette somme à une trentaine de millions, soit bien moins que l'estimation de l'ancienne administration.

L'élu responsable des finances, Benoit Dorais, a indiqué hier que les sommes récupérées par la Ville en vertu du programme volontaire mis en place dans la foulée de la commission Charbonneau se trouvaient dans les états financiers de l'année 2017. Impossible de préciser la somme encaissée, la loi stipulant que «tout ce qui est dit ou écrit dans le cadre de l'application du programme est confidentiel».

Montréal prévoyait rendre cette information publique dans ses états financiers, mais «Québec nous a mentionné qu'il ne voulait pas le montant explicite. Il va en faire l'annonce formelle via la ministre de la Justice», a précisé M. Dorais.

L'administration Plante a toutefois invité Québec à détailler avec précision combien chaque ville a reçu en remboursement grâce à ce programme.

«Le gouvernement voudra-t-il ventiler par ville? Je n'ai aucun problème avec cela, et on enjoint même au gouvernement de faire une telle ventilation», affirme M. Dorais.

S'il n'a pas dévoilé le montant précis, le bras droit de Valérie Plante a toutefois indiqué que ces sommes ont été incluses dans les transferts gouvernementaux. Forte de cette information, l'opposition dit avoir effectué des calculs et en être arrivée à un montant de 31,1 millions.

La Presse a fait des calculs similaires et est plutôt arrivée à une somme de 29,7 millions. En effet, les états financiers indiquent que les transferts gouvernementaux ont été plus élevés de 105,4 millions par rapport aux prévisions budgétaires. Le document précise que l'écart s'explique par le transfert à Montréal des terrains de l'hippodrome, dont la valeur est estimée à 33,6 millions, une subvention en culture de 24,1 millions, une aide de 9,4 millions pour la décontamination d'un terrain ainsi que le versement de 8,6 millions grâce à l'entente Réflexe Montréal. Bref, il reste une hausse inexpliquée de 29,7 millions, un montant élevé qui aurait normalement dû être détaillé.

Trop peu, juge l'opposition

Si cette évaluation devait se confirmer, l'opposition estime que la somme récupérée est bien faible. «Ça me paraît peu. J'étais impliqué dans l'ancienne administration, et on avait une évaluation de 100 millions», a indiqué Lionel Perez, qui était responsable des infrastructures sous Denis Coderre. Il serait d'autant plus surpris que Laval, qui a attribué nettement moins de contrats durant la période trouble affectée par la collusion, aurait reçu 20 millions.

Benoit Dorais n'a pas voulu confirmer ces calculs évaluant les sommes à une trentaine de millions, disant que tant la vérificatrice générale de Montréal que la firme de vérification externe se sont butées à une fin de non-recevoir de Québec.

L'opposition s'est indignée du refus, estimant qu'«aucune embûche légale» n'empêchait Montréal de rendre l'information publique. La loi ayant créé le programme interdit uniquement de dévoiler le nom des participants au programme, selon M. Perez. «Votre obligation première est envers les Montréalais.»