Le centre-ville est devenu dangereux pour les cyclistes, notamment la rue Sherbrooke, selon la présidente de Vélo-Québec, Suzanne Lareau, qui révèle que son organisme présentera à la Ville de Montréal, la semaine prochaine, un diagnostic des déplacements à vélo et des propositions d'aménagements pour les rendre plus sécuritaires.

« Plus il y aura d'aménagements cyclables, moins il y aura de confrontations entre les usagers de la route », souligne Mme Lareau.

Le débat suscité par la diffusion, la semaine dernière, d'une vidéo dans laquelle on voit un cycliste se faire frôler dangereusement par un autobus de la Société de transport de Montréal (STM) sur la rue Sherbrooke justifie la nécessité de réaménager certaines artères pour faciliter la circulation à vélo, selon elle.

« Ça fait 40 ans que je fais du vélo à Montréal, mais j'ai maintenant peur de rouler au centre-ville, parce qu'il y a beaucoup de véhicules, qui sont de plus en plus gros, et à cause des travaux et des embouteillages qui obligent les cyclistes à se faufiler de façon dangereuse, dit-elle. C'est chaotique, on est sur les nerfs, comme le cycliste qui s'est fait frôler par un autobus la semaine dernière. »

Vélo-Québec fera notamment de nouvelles propositions d'aménagements pour la rue Sherbrooke dans son rapport présenté à la Ville. Cette importante artère, la plus directe pour les déplacements dans l'axe est-ouest, est utilisée par de nombreux cyclistes, selon plusieurs études, malgré la densité de la circulation.

« Moi-même, je déteste prendre la rue Sherbrooke parce que je trouve ça dangereux », admet Suzanne Lareau. Pourquoi les cyclistes l'empruntent-ils quand même ? Parce que c'est pratique pour eux, dit-elle.

« Comme les automobilistes ou les usagers du transport en commun, ceux qui vont travailler à vélo cherchent les trajets les plus rapides. Ils ne vont pas faire un détour d'une demi-heure s'ils ont une route plus directe. » - Suzanne Lareau, présidente de Vélo-Québec

Mme Lareau laisse entendre que les propositions de Vélo-Québec pour la rue Sherbrooke pourraient inclure la remise en question du stationnement sur rue et l'instauration de voies réservées pour les autobus.

C'est l'ex-maire Denis Coderre qui a donné à l'organisme le mandat de préparer ce diagnostic, en septembre 2017.

MOINS DE PLAINTES

La vidéo diffusée la semaine dernière par un cycliste qui voulait dénoncer le comportement d'un chauffeur d'autobus de la STM a suscité de vives réactions. On voit l'autobus passer très près du cycliste, qui interpelle ensuite le chauffeur pour dénoncer son attitude. Il a aussi déposé une plainte officielle.

La direction de la société de transport doit rencontrer son employé et a promis de prendre des « mesures appropriées » à la suite de la plainte.

Il a été impossible de savoir si la STM impose des sanctions disciplinaires à ses chauffeurs quand se produit ce type d'incident. « Chaque cas est analysé en tenant compte du dossier de l'employé, des faits reprochés et de leur gravité, des circonstances autour de l'incident., etc. », explique le porte-parole de la STM, Philippe Déry.

Malgré l'augmentation du nombre de déplacements à vélo en ville, il y a moins de plaintes des cyclistes envers le comportement des chauffeurs d'autobus depuis quatre ans, signe que la cohabitation dans les rues s'améliore, selon M. Déry.

Plus de 1400 bus sont en service à l'heure de pointe à Montréal, ce qui tend à démontrer que l'incident rapporté la semaine dernière est un cas isolé, estime le porte-parole de la STM, soulignant que la sécurité routière et les enjeux de partage de la route sont abordés durant la formation des nouveaux chauffeurs et dans des activités de sensibilisation auprès du personnel en place.

Même si elle estime que les camions représentent un plus grand danger pour les cyclistes que les autobus, Suzanne Lareau dénonce tout de même la grande réticence du syndicat des employés de la STM à l'endroit de toutes les mesures favorisant les déplacements à vélo. Elle donne comme exemple les supports à vélos sur les autobus, la présence des vélos dans le métro et la circulation des cyclistes sur les voies réservées aux bus.

« Dans toute l'Amérique du Nord, 80 000 bus sont dotés de supports à vélos, mais à Montréal, il n'y en a que sur cinq lignes, déplore-t-elle. Sur la rue Viau, ça fait quatre ans qu'on a un projet-pilote pour permettre aux cyclistes d'emprunter la voie réservée, mais il n'y a rien qui se passe. Chaque dossier demande une longue bataille. »

Un porte-parole du Syndicat canadien de la fonction publique, auquel est affilié le syndicat des chauffeurs d'autobus de la STM, a refusé de faire plus de commentaires sur le dossier, après avoir simplement fait savoir, la fin de semaine dernière, qu'il avait l'intention d'appuyer l'employé visé par la plainte.