Il n'y a plus qu'une poignée de résidences qui devront être expropriées pour réaliser le projet de Réseau électrique métropolitain de la Caisse de dépôt et placement. Le BAPE avait évalué que 219 propriétaires devraient céder leur propriété. Or, une revue plus détaillée du projet a ramené à 113 le nombre de propriétés qui vont faire l'objet d'une expropriation.

De ces propriétés, 85 sont des terrains sans bâtiment et 16 sont des commerces. Restent 12 résidences, et déjà quatre ont convenu des termes de la vente au public. Il y a donc huit propriétaires à convaincre, a appris La Presse.

Mais pour mettre à l'abri l'échéancier que s'est donné la Caisse de dépôt pour la réalisation du Réseau électrique métropolitain (REM), le gouvernement se donne le droit d'exproprier plus rapidement les habitations, les commerces et les terres agricoles sur le parcours du futur train.

Le projet de loi 137 déposé hier à l'Assemblée nationale par le ministre des Transports, Laurent Lessard, prévoit des négociations quant au montant de l'indemnisation, mais l'expropriation ne pourra être retardée par les propriétaires. Le ministre des Transports pourra décréter l'expropriation sans avoir l'approbation du Conseil des ministres. On entend être souple quant à la prise de possession, mais le bien commun exige que le projet aille de l'avant, a déclaré le ministre Lessard en point de presse.

Ainsi, Québec veut « diminuer les délais d'expropriation le long du parcours. Il y a un retrait de la possibilité de contestation, mais les droits sont maintenus pour la négociation sur les indemnités », a-t-il expliqué. Les indemnités tant provisoires que finales pourront être contestées. Québec a mis en réserve 171 millions pour dédommager les expropriés.

L'examen du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE), très défavorable au projet de REM, avait évalué à 219 le nombre de résidences et de commerces devant être expropriés. Une analyse plus fine ramène ce chiffre à 113. Le ministre Lessard a rappelé les déboires du gouvernement Charest dans le dossier de l'autoroute 173, en Beauce. Deux tronçons avaient été réalisés, mais il avait fallu légiférer pour forcer l'expropriation afin de pouvoir terminer l'autoroute.

« BULLDOZER LÉGAL »

En réaction, le porte-parole péquiste en matière de finances, Nicolas Marceau, a dénoncé ce projet de loi, le décrivant comme un « bulldozer légal » qui prive les citoyens de droits fondamentaux. « On sort la grosse artillerie pour exproprier des citoyens sans appel, en les privant de la possibilité de contester. » Cette loi prévoit qu'elle a préséance « sur toute autre loi. On a déjà eu un BAPE écourté, on a déjà des informations au compte-gouttes, on voit que le gouvernement est prêt à tout pour son engagement électoral », a lancé M. Marceau.

Pour Benoît Charrette, député de la CAQ, le projet du REM est bienvenu, mais en l'absence d'un engagement formel du gouvernement fédéral, le projet de loi est « prématuré ». « On a un projet qui est sur la table, mais dont la structure de financement n'a pas du tout été confirmée. [...] Il y a encore un grand, grand absent, qui est le gouvernement fédéral. »

Pour Manon Massé de Québec solidaire, le projet du REM devrait être envoyé sur une voie de garage. Déjà, Québec a écarté « grossièrement » le constat défavorable du BAPE, mais le gouvernement veut « une fois de plus passer par-dessus les droits des citoyens et des municipalités. C'est inacceptable ! », a soutenu Mme Massé, prédisant le déraillement du projet, « un très gros projet pour impressionner la galerie » qui rappelle l'aventure du Titanic.