Une vague d'incidents antisémites impliquant des croix gammées dessinées dans la neige secoue la communauté juive depuis quelques jours. Pour y faire face, des citoyens d'Outremont ont eu l'idée de répondre avec... des coeurs.

OÙ CES ÉVÉNEMENTS SE SONT-ILS PRODUITS ?

Dimanche après-midi, des résidants de la rue Hutchison, dans Outremont, ont remarqué la présence de croix gammées tracées dans la neige sur le capot d'une demi-douzaine de voitures. « Il y en avait probablement plus », croit Harvey Levine, porte-parole québécoise de l'organisation juive B'nai Brith. « Les résidants de la rue Hutchison sont à plus de 70 % de confession juive hassidique. C'est clair que c'est eux qui étaient visés. » Un autre événement similaire a été rapporté jeudi dernier à Winnipeg, où un svastika portant l'inscription « Fuck Jews » a été aperçu dans la neige par l'ancienne ministre néo-démocrate de la Famille Christine Melnick.

QUELLE A ÉTÉ LA RÉACTION ?

Les images de croix gammées d'Outremont ont vite circulé sur Facebook et Twitter. En réaction, un groupe de six citoyens est descendu dans la rue et s'est mis à dessiner des coeurs sur les pare-brise enneigés. « J'étais fâchée et triste, dans le contexte actuel, de voir une telle attaque haineuse. Je me suis dit que ça ne donnait strictement rien de rester fâchée en contemplant ma page Facebook. Alors j'ai décidé de faire ce petit geste, qui pouvait faire contrepoids », a expliqué Claire Trottier, une des instigatrices du mouvement. Leurs images ont immédiatement inondé les réseaux sociaux, attirant l'attention des télévisions anglophones, qui ont couvert l'histoire mardi. « Je ne m'attendais pas à un tel retentissement », a commenté pour sa part Sarah Dorner, qui a participé à ce geste spontané.

CES INCIDENTS ONT-ILS UN LIEN AVEC LA TUERIE DE LA GRANDE MOSQUÉE DE QUÉBEC ?

B'nai Brith affirme que oui, mais que l'ensemble de l'actualité - notamment le décret anti-réfugiés du président américain Donald Trump - contribue à une hausse des incidents haineux. « Avec le Muslim ban, on voit beaucoup de racisme émerger. Certaines semaines, ce sont les musulmans qui sont les cibles, d'autres semaines, ce sont les juifs. Chose certaine, c'est de plus en plus fréquent », soutient M. Levine. B'nai Brith s'apprête à publier les résultats d'un recensement annuel des gestes antisémites qui lui ont été rapportés. Un bilan publié l'année dernière avait rapporté une hausse de 22 % de ces actes entre 2014 et 2015.

Y A-T-IL EU D'AUTRES GESTES RACISTES CES DERNIERS JOURS À MONTRÉAL ?

Oui. Le Module des incidents et des crimes haineux du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) a demandé hier l'aide du public pour identifier le suspect d'un méfait visant une mosquée de l'arrondissement du Sud-Ouest, le 2 février dernier. Le suspect, un homme blanc âgé d'environ 40 à 50 ans, qui portait des lunettes fumées à montures blanches, un manteau noir, des chaussures de course et des jeans foncés, est soupçonné d'avoir lancé une brique vers une fenêtre du lieu de culte. En début de semaine, des propos haineux ont aussi été découverts sur une page Google Docs du Club de natation de Côte-Saint-Luc, un arrondissement habité en majorité par des citoyens de confession juive. Les noms de plusieurs enfants ont été remplacés par des slogans pro-Hezbollah et anti-israéliens. Le Centre consultatif des relations juives et israéliennes (CIJA) a demandé aux policiers de mener une enquête. Le SPVM indique avoir enregistré 11 plaintes de crimes haineux et 41 signalements d'incidents haineux entre la date de la fusillade de la Grande Mosquée de Québec et le 2 février.