Les élus montréalais d'opposition ont dénoncé le rapport de la commission de la sécurité publique de Montréal qui a entendu le SPVM sur sa surveillance des journalistes, y voyant une simple opération de relations publiques.

L'administration Coderre avait demandé à la commission de la sécurité publique d'étudier les procédures du SPVM pour l'obtention de mandats ciblant les journalistes, dans la foulée de l'espionnage du chroniqueur de La Presse Patrick Lagacé. Le rapport déposé lundi après-midi au conseil municipal a laissé les élus d'opposition sur leur faim, le document ne formulant aucune recommandation ou réprimande envers le corps policier.

« Toute cette affaire a les apparences d'ingérence politique dans les affaires opérationnelles du SPVM. C'était tout à fait inapproprié », a dénoncé l'élu Alex Norris, de Projet Montréal.

Plusieurs autres conseillers ont aussi dénoncé le rapport, le jugeant incomplet. « Toute personne raisonnable va conclure que le service de police a agi de façon abusive en espionnant ces journalistes, a dénoncé le conseiller Marvin Rotrand, de Coalition Montréal. Ce rapport ne va rien changer, il sera oublié demain. La vraie enquête sera faite par Québec. »

« Ce rapport est un échec », a quant à lui dénoncé le conseiller Steve Shanahan, de Vrai changement. Sa collègue Lorraine Pagé a aussi estimé que Montréal aurait pu aller plus loin. « On nous dit il y aura une commission d'enquête. C'est vrai. Mais on ne peut pas sous-estimer que les choses se sont passées au Service de police de la ville de Montréal. Pas à la Sûreté du Québec, pas à Laval : à Montréal. »

L'élue s'est aussi inquiétée de voir le haut taux d'obtention des mandats quand les policiers en font la demande à un juge de paix. « Quand 98,6 % des mandats sont accordés, je ne suis pas sûre que c'est une bonne nouvelle », a dit Lorraine Pagé.

L'élue responsable de la sécurité publique au sein de l'administration Coderre, Anie Samson, a défendu le travail de la commission. « Le mandat était très clair : c'était pas une commission d'enquête sur ce qui s'est passé. » Les élus se sont ainsi limités à une présentation sur les procédures du SPVM. Aucune comparaison avec les procédures des autres villes n'a été faite, aucun expert externe n'ayant été entendu. Alors que les membres de la commission se sont questionnés pour savoir comment définir qui est un journaliste et qui ne l'est pas, on n'a pas non plus jugé bon entendre la Fédération professionnelle des journalistes du Québec. « Ce n'était pas dans le cadre de notre mandat. Ça débordait », a poursuivi l'élue.

Anie Samson a dit avoir été satisfaite des explications du SPVM, notamment sur les démarches légales à remplir avant d'obtenir un mandat. Elle a d'ailleurs indiqué que l'intervention contre les huit dispensaires de marijuana ouverts la semaine dernière à Montréal avait été retardée de 24 heures pour remplir les conditions juridiques afin d'obtenir les mandats nécessaires.

La FPJQ déçue

«Je trouve cela absurde. Ils se demandent c'est quoi un journaliste et ils ne nous ont même pas invités, ils n'ont invité aucun journaliste», a déploré le président de la FPJQ, Stéphane Giroux. Celui-ci voit d'ailleurs dans le questionnement sur le statut de journaliste une façon de blâmer les reporters pour cet épisode d'espionnage.

L'organisation représentant les journalistes professionnels qualifie le rapport des élus de «superficiel». Même si le document fait 70 pages, «leurs observations tiennent sur une demi-page, note Stéphane Giroux. Je vois un rapport d'une complaisance absolue dans lequel la police ne se remet pas en question.»

Le débat sur la surveillance policière a donné lieu à des échanges corsés, notamment lorsque l'élu Alex Norris a qualifié la surveillance de « scandale ». Le conseiller a été contraint par le président du conseil de retirer le mot.